[Vidéo] Message aux indignés des poubelles (brûlées)

Dans une tribune vidéo originale, Cerveaux Non Disponibles dénonce pêle-mêle : indignation molle, figures médiatiques, réformisme soc-dem, respectabilité dans les médias, nasses mobiles négociées avec services d’ordre et robocops. Un plaidoyer bienvenu contre la dissociation alors que de prétendus libertaires sont tentés de nous ressortir les vieilles ficelles.

Alors qu’Extinction Rebellion nous parle d’urgence, que le NPA nous dit que sinon ça va péter, que certains de l’UCL ou Sud réhabilitent les services d’ordre de la CGT, Cerveaux Non Disponibles a publié récemment, à rebours, une tribune vidéo originale (ci-dessous dans l’article) prenant la forme d’un plaidoyer pour la diversité des tactiques, contre la dissociation, pour la révolution. Au delà des légitimes discussions sur les réussites et les échecs des manifestations du 28 novembre et du 5 décembre 2020 derniers contre les lois Sécurité Globale, Séparatisme et les décrets renforçant encore un peu plus le fichage des oppositions, cette clarification nous parait salutaire.

Que les choses soient claires : à chaque banque ravagée, à chaque agence immobilière redécorée, à chaque supermarché pillé, à chaque barricade installée, à chaque SUV incendié, à chaque DAB éclaté, à chaque moyen de transport perturbé, à chaque place occupée, à chaque plateforme logistique bloquée, à chaque rouage de la technostructure capitaliste sabotée, nous nous réjouissons, nous sommes solidaires, nous participons, nous revendiquons, en conservant l’anonymat ou pas selon les circonstances et les stratégies. Pas de place pour la dissociation.

Il s’agit juste de savoir raison garder : ne pas attribuer une portée délirante à chacun de ces actes face au rouleau-compresseur étatique. Le pouvoir ne vacille pas facilement et les rares fois où cela arrive, il montre les muscles, comme le 8 décembre 2018, quand il a envoyé pour la première fois des véhicules blindés dans Paris intra-muros.

Puisque la situation est grave, tant du point de vue de la crise sociale et environnementale que de la tyrannie techno-sécuritaire qui s’installe, relayer des discours attentistes ou pacificateurs, n’envisager les révoltes uniquement qu’au futur, ne sont pas des options.

Rendez-vous dans la rue !

La tribune vidéo

La vidéo est dispo sur le Peertube de video.antopie.org ou celui d’indymotion.fr ou encore chez les GAFAM. Copiez, partagez, utilisez Peertube et Mastodon !

  • texte : CND & b-br
  • edit : lfdlm
  • mix : palayam
  • image : Dernier acte : Julien Rogue (Pour le reste, il y en a trop, désolé.)
  • musique : Omnicrom-Neud Photo / Pavel Milyakov - Crusading - Pye Corner Audio - Resist / Unfinished Portraits - (1) Shlohmo - Hopeless / Aphex Twin - QKTr
  • année : 2021

La tribune texte

publiée initialement sur Cerveaux Non Disponibles

Face à la gravité de la situation, face à l’urgence sociale et climatique, nous pensons que vous n’êtes pas la hauteur. Vous, les partis, syndicats, organisations, coordinations. Vous, les personnalités, les représentants, figures, les têtes.

Nous sommes des millions à vouloir remettre l’Histoire en marche. On ne parle pas d’empêcher des réformes néolibérales ou pré-fascistes. Non, nous voulons démonter le système qui les produit, avant qu’il ne détruise toute la vie, toutes les vies. Nous savons que cela ne pourra se faire sans que l’ancien monde résiste, se batte, riposte.

En France, les Gilets Jaunes ont fait briller une lueur magnifique et entrouvert la porte de cet horizon, disons le, révolutionnaire. Mais la porte est restée fermée au prix d’une répression inouïe.

Feignant de rallier cet idéal, ou craignant de le porter pleinement, les structures qui ont depuis repris en main l’essentiel des luttes en cours ont trop souvent amené avec elle un jeu bien connu consistant à accepter les injonctions du pouvoir à se désolidariser des manifestants considérés comme violents.

Ça n’est pas nouveau, c’est même complètement périmé.

Dans un pays où des personnes se battent contre la montée d’un autoritarisme de plus en plus fou, contre le racisme, contre les violences policières, contre la violence sociale qui s’abat sur les plus faibles. Un pays où l’assassin de Zineb Redouane est toujours CRS, où la police entaille les tentes des migrants, où le gouvernement a pris tout le monde pour des cons en pleine pandémie. Vous, vous condamnez une infirmière parce qu’elle a jeté une pierre en direction de policiers en armure, vous condamnez un pompier parce qu’il a jeté un fumigène, un gilet jaune parce qu’il a lancé des feux d’artifice contre la BAC, et un black bloc parce qu’il a donné un coup de marteaux dans la vitrine d’un magasin de luxe.

Vous condamnez, vous condamnez, vous condamnez. Seulement chacune de vos condamnations légitime la prochaine réforme visant à nous empêcher de manifester. Prochaine réforme qui vous permettra de feindre de redécouvrir la dégueulasserie qui nous gouverne.

En réalité vous aidez le pouvoir.

Comme nous sommes alliés, nous allons être franc. C’est ça qui nous emmerde. Pas le fait que vous pensiez encore pouvoir réformer le système, de l’intérieur, peut-être en y tirant quelques intérêts pour vous et vos structures, ni le fait que vous n’ayez toujours pas compris qu’il n’y a plus de négociation possible à ce moment de la crise structurelle du capitalisme. Non. Le fait que bon gré mal gré vous participiez à la répression des luttes parce qu’après tout, une nasse de deux kilomètres à la place d’une manifestation, il faut bien ça pour empêcher les poubelles de brûler…

Ça ne fait pas de vous des ennemis. Mais sachez qu’à une époque où tout semble possible, et surtout le pire, nous sommes de ceux et celles qui ne comptent pas laisser l’espoir enterré par des jugements moralisateurs servis à des chaînes télé et des journaux propriétés d’oligarques.

Nous ne faisons pas de morale, nous faisons de la politique, dictée par notre envie de construire un autre pays, un autre monde. D’y vivre dignement et d’y être heureux.

Il semble que la question entre vous et nous n’est pas de savoir si nous sommes du même coté de la barricade. Si vous avez du temps et de l’énergie pour expliquer en quoi une BMW qui brûle ne sert pas la cause alors que le monde brûle, que des milices armées répriment toute les luttes sociales, que des millions de personnes crèvent en silence pendant que les milliardaires s’enrichissent de plus en plus… C’est objectivement que vous n’êtes pas sur la barricade.

Et c’est dommage car il nous semble que comme nous et des milliers d’autres, vous avez secrètement jubilé lors des actes Gilets Jaunes les plus insurrectionnels, quand Christophe Dettinger boxait et qu’une porte de ministère tombait sous les coups d’un Fenwick.

Assumez…

De notre coté nous le crions. C’était beau. C’était beau parce que ça avait la saveur de l’espoir. Et dire cela ne fait pas de nous des assoiffé.es de violence et de chaos. Dire cela c’est savoir où et quand le pouvoir vacille réellement, même de façon furtive et localisée, et c’est s’en réjouir.

Alors oui, assumons. Quand nous voyons de la révolte, notre cœur s’emballe, et quand nous voyons du feu, c’est notre corps qui brûle de désir pour demain, parce que nous rêvons tous les jours d’un monde meilleur que celui qui ne tient plus que par la force. Un monde de liberté. Un monde solidaire. Un monde qui ne soit plus régi par le profit de quelques uns. Un monde où la nature est au centre de décisions prises collectivement. C’est pour cet horizon que nous nous battons. Que nous vibrons. Et c’est pour cet horizon que détruire l’ancien monde est notre désir le plus cher.

Vous le savez. Sous le vernis civilisé, c’est bien dans l’horreur et l’inhumanité sans nom que nous vivons. Le futur qui se dessine à la couleur de l’abîme. Soyons ensemble à la hauteur et faisons tout notre possible, maintenant, sans relâche et avec amour.

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