Un policier aux assises pour mutilation au flashball ?

Après avoir attendu deux ans et quatre mois la procureure de Bobigny vient de rendre ses conclusions. Sur les trois policiers mis en examen, le parquet requiert un non lieu pour deux d’entre eux. Il demande le renvoi devant la cour d’assises du policier qui a tiré sur Joachim Gatti.

C’était il y a presque cinq ans. Au petit matin a eu lieu l’expulsion de La Clinique, place du marché à Croix de Chavaux (Montreuil). Il s’agissait d’une ancienne Clinique occupée par des camarades, un lieu qui cherchait à être ouvert sur le quartier, sans compromission avec la Mairie et les institutions étatiques. Bref, un lieu de lutte.

Le bâtiment est évacué le matin du 8 juillet. Le soir même, un rassemblement a lieu devant la Clinique. Les flics chargent et jouent au ball trap avec les gens présents. Plusieurs personnes sont blessées à la tête et une personne perd un œil...

S’en suivra une autre manifestation assez massive et soutenue par les montreuillois et montreuilloises.

A la suite de cette « bavure », c’est un long, un très long parcours juridique pour déterminer les responsabilités de chacun. Par ailleurs il ne s’agit pas d’un cas isolé et de nombreuses personnes en France ont déjà été mutilées par des flash-balls.

Visiblement, le flic qui avait ordre de tirer au flash-ball ce soir là s’est fait lâcher par ses supérieurs...

Le communiqué du collectif 8 juillet :

Après avoir attendu deux ans et quatre mois, la procureure de Bobigny vient de rendre ses conclusions. Sur les trois policiers mis en examen, le parquet requiert un non lieu pour deux d’entre eux. Il demande le renvoi devant la cour d’assises du policier qui a tiré sur Joachim Gatti.

Nous sommes six à avoir été touchés et blessés ce soir-là, nous sommes quatre à avoir porté plainte. Tous les tirs étaient dirigés vers nos visages. Nous avons été touchés à la nuque, à la clavicule, au front et à l’œil. Tous les tirs auraient pu nous blesser grièvement. Or, le parquet ne demande le renvoi devant la cour d’assises que d’un policier, celui qui a éborgné Joachim.

Nous sommes six à avoir été touchés et blessés ce soir-là, nous sommes quatre à avoir porté plainte. Tous les tirs étaient dirigés vers nos visages.

Il est pourtant évident que les trois tireurs mis en examen par le juge d’instruction partagent la responsabilité. En droit, il y a une expression pour dire cela : il s’agit d’un cas avéré de violence en réunion. On retrouve les mêmes entorses au règlement d’utilisation du flash-ball : le non respect de la distance de tir, de la zone de tir, et aucune légitime défense n’est soutenable comme l’a confirmé le parquet. Donc la même intention de faire mal, de blesser. De ce fait, il n’y a aucune raison de ne renvoyer qu’un seul policier en cour d’assises.

Car ce qui est en cause ici, c’est une opération policière où l’on retrouve chez les policiers une volonté partagée d’en découdre, de punir des personnes qui depuis des années militent pied à pied dans la ville contre les rafles de sans-papiers, contre les expulsions de logement, contre les radiations dans les pôle emploi.

Opération policière dans laquelle la hiérarchie a une grande responsabilité. Sinon comment expliquer la détermination partagée des policiers à nous tirer dessus, alors que nous étions en train de nous disperser ? Entre autres éléments du dossier, on peut évoquer la carte blanche donnée aux policiers ce soir-là.

Devant le caractère accablant du dossier, la police et la justice ont décidé de lâcher un policier et de lui faire porter toute la responsabilité, laissant croire qu’il s’agit là d’un acte isolé, d’un accident en somme.

Croyez-nous, nous avons bien plus de colère contre ceux qui ont armé les policiers et les ont lâchés sur nous, que contre les tireurs. Qu’ils comptent sur nous pour ne pas les oublier. Notons qu’avec d’autres personnes blessées par la police, nous avons porté plainte devant le tribunal administratif.

Croyez-nous, nous avons bien plus de colère contre ceux qui ont armé les policiers et les ont lâchés sur nous, que contre les tireurs. Qu’ils comptent sur nous pour ne pas les oublier.

Pour l’instant, nous attendons la décision du juge d’instruction auquel nous allons remettre des observations dans ce sens.

Pour l’instant, nous attendons les décisions concernant toutes les histoires où des policiers ont tué ou blessé des personnes.

Et nous appelons à la manifestation nationale des victimes de la police, au métro Anvers à 15 h à Paris aujourd’hui le 5 avril 2014.

Collectif huit juillet – Se défendre de la police
huitjuillet@riseup.net


Extrait d’un article du parisien

Le parquet de Bobigny vient de rendre son réquisitoire définitif dans une enquête portant sur des tirs de flashball qui ont crevé l’œil d’un homme de 34 ans, sur la place du marché à Montreuil (Seine-Saint-Denis) en juillet 2009. Un policier a été renvoyé vendredi devant les assises. Il sera jugé pour « violences volontaires ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente » lors d’une manifestation contre une expulsion de squatteurs expulsés d’une clinique désaffectée.

Plusieurs personnes avaient été blessées. L’enquête a révélé six tirs de flashball et le juge d’instruction avait mis en examen trois fonctionnaires de police. C’était en décembre 2011. Depuis, plus rien. Le 23 mars 2014, les blessés ont signé une lettre ouverte intitulée « Que fait la justice ? Ça crève les yeux ? » adressée à la procureur de la République de Bobigny, Sylvie Moisson, s’inquiétant du silence du parquet sur cette affaire, depuis deux ans et trois mois.

Le parquet avait promis une réponse dans les trois jours. Le réquisitoire définitif est finalement arrivé sur le bureau du juge ce vendredi. Le ministère public estime que le policier mis en cause pour la mutilation de Joachim Gatti a volontairement tiré à deux reprises et n’était pas en légitime défense. Il estime qu’il s’agit de violences aggravées de nature criminelle, qui « entraînent le renvoi du policier devant la cour d’assises ».

Aucune poursuite n’est envisagée contre les deux autres policiers. Le juge avisera avant de rendre son ordonnance.

Mots-clefs : flashball - LBD
Localisation : Montreuil

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