Je suis arrivé sur le rassemblement aux environs de 19h 30. Environ 200 personnes se massaient devant la sortie du métro porte de Pantin. J’ai appris à ce moment là qu’il y avait déjà eu des affrontements.
Premier point notable : pas de tracts, pas de banderoles, pas de slogans. Juste des gens plus ou moins masqués, plus ou moins jeunes qui se sont regroupé face à des flics pas très répressifs à ce moment là et qui se contentent de protéger les militants frontistes qui vont au meeting. Il est important de noter que les flics travaillaient main dans la main avec le DPS, le service d’ordre à tendance paramilitaire du FN.
Après un moment de flottement, les deux cents personnes qui se trouvaient devant le métro décident de partir en cortège pour contourner le dispositif et rentrer. Les flics sont pas très nombreux à cet endroit là mais nous non plus. Un face à face à lieu dans le jardin de la Villette où des journalistes sont malmenés assez gratuitement par les flics. Jets de projectiles et gazages se succèdent pendant environ une demi heure jusqu’à ce que le groupe de 200 personnes se décide à bouger pour trouver une autre faille dans le dispositif policier.
On est vraiment pas nombreux et en faisant le tour du parc on tombe sur des passant.es éberlué.es et des personnes aux fenêtres qui nous demande ce qu’on fait là, ne sachant même pas qu’il y a un meeting du FN. Les questions « vous défendez quoi ? », « vous êtes des anars ou des fachos ? » mettent particulièrement mal à l’aise. Ajoutez à ça aucun slogan, aucun tract, on se sent un peu étranger dans ce quartier populaire qui n’est pourtant pas un bastion frontiste…
Après avoir tenté de passer le long du canal de l’Ourq et s’être encore pris un gazage massif, les gens refluent et traversent le même canal. On voit en face un autre groupe qui comme nous essaie de percer le dispositif policier sans plus de succès visiblement.
Après un long détour on se retrouve tous dans le parc de la Villette, côté cité des sciences. On a bien sur très mal manœuvré car maintenant on ne peut passer que par deux endroits : les passerelles qui surplombent le canal. Échec tactique.
Des personnes attaquent les flics sur la passerelles mais bon, la passerelle est haute et peu de projectiles atteignent leur cible. On a le renfort de quelques jeunes de la cité d’à coté, on doit être 300 environ. Les flics des compagnies d’interventions aidées par quelques gardes mobiles gazent abondamment.
On tente les deux passerelles sans succès évidemment. Les flics nous gazent depuis l’autre coté du canal sans qu’on puisse rien faire. On décide alors de s’approcher du Zenith en passant par les voies du tram via la porte de la Villette. Arrivé assez proche du meeting, ça gaze encore et les gens partent à gauche en direction de Pantin.
Je n’ai pas assisté à la suite.
Si certaines images triomphalistes sont à l’œuvre aujourd’hui sur les réseaux sociaux, notamment liées au cocktail molotov qui a visé (et raté) cet imbécile de Gilbert Collard, ce rassemblement nous laisse un goût amer.
Nous étions très peu à nous opposer au meeting du FN. Non pas que nous soyons peu dans la société, mais nos forme d’organisations créent notre isolement. Et pour preuve :
- Aucun appel n’avait été fourni à part l’annonce de « journée d’action »
- La propagande n’avait eu lieu que sur des groupes facebook, des pages facebook, excluant de fait les gens non militants ou simplement les militants qui ne sont pas sur ces pages.
- Pas un collage, pas un tractage n’avait eu lieu dans les quartiers aux alentours. Et pourtant , le 19e arrondissement et ses barres d’immeubles gigantesques regorgent de personnes ne souhaitant pas voir un meeting du FN se dérouler à 1 kilomètre de chez eux.
Tout ces éléments font que nous étions irrejoignables plus qu’ingouvernables. Tout simplement car la population ne savait pas pourquoi nous étions là.
Faisons preuve d’ambition. Cessons de penser que nous sommes seuls dans cette société. Des alliances sont possibles. Avec des prolétaires, des personnes issues de l’immigration, des gens tout simplement antiracistes. Ce genre d’action ne fait que renforcer notre isolement politique et nous marginalise. La prochaine fois, tachons de faire le minimum pour que nous ne soyons pas qu’un seul groupe de 300 personnes mais 10. Contribuons à construire de réels rapport de force et non pas des présences émeutières dénuées de dangerosité pour l’État.