Programme du café-librairie Michèle Firk

Programme des événements du café librairie Michèle Firk à la Parole Errante, local autogéré de discussions et d’organisations.

Fin mars, on vous invite à discuter sur la monnaie, les figures de la révolution africaine et la biologie synthétique. Au delà de la librairie, le programme des événements à la Parole Errante continue, venez-donc le samedi 31 mars au concert de l’émeute philarmonique de Sec,tout le programme est là : http://laparoleerrantedemain.org/

Comme c’est l’habitude à Michèle Firk, les discussions sont suivies d’un verre et d’une salade pour prolonger les débats.

Samedi 24 mars - 19h30 - Rencontre autour de « la Monnaie. L’argent comptant de l’a priori » d’Alfred Sohn-Rethel

Discussion avec la traductrice du livre, Françoise Willmann, Vincent Chanson et les éditions la tempête

Alfred Sohn-Rethel fait partie, avec Walter Benjamin ou Sigfried Kracauer, de ces outsiders de l’École de Francfort. La thèse qu’il défendra toute sa vie repose sur une intuition de jeunesse : les catégories de l’entendement – celles qui sont l’a priori de nos différentes perceptions du monde dans la philosophie kantienne – ne sont pas de tout temps et de toute éternité, mais sont construites historiquement.

L’originalité de Sohn-Rethel, c’est de mettre en avant la fonction de l’argent comme liant commun entre les individus pourtant séparés les uns des autres. Cette recherche avance que c’est lors de la première frappe de la monnaie, en Ionie et en Lydie dans la Grèce antique, que les catégories abstraites ont pu naître, engageant ainsi une pensée qui se sépare progressivement de tout rapport avec le monde concret. Cette histoire, c’est celle d’un véritable renversement de perspective, où la matérialité du monde se soumet à la pensée abstraite et où le travail intellectuel finit par dominer le travail manuel – renversement qui trouvera son point d’aboutissement dans le capitalisme et les conceptions modernes de la science.

« Que vaut notre matérialisme historique s’il nous faut rester idéalistes en ce qui concerne la théorie de la science et de la logique ? »

https://editionslatempete.com/la-monnaie/

"Ma pensée s’est nourrie de contacts avec Ernst Bloch, Walter Benjamin, Theodor W. Adorno, Siegfried Kracauer, et d’influences reçues des travaux de Georg Lukács, Max Horkheimer et Herbert Marcuse. Cette évolution commença vers la fin de la Première Guerre mondiale et dans les années suivantes, à l’époque où la révolution prolétarienne allemande se préparait, puis sans nécessité échoua pour des raisons politiques. Si étrange que cela puisse paraître aujourd’hui, je n’hésite pas à dire que la pensée marxiste moderne en Allemagne, dont témoigne par exemple l’École de Francfort, est née des élans de cette époque et donc, d’une certaine manière, de la superstructure théorique et idéologique de la révolution avortée. On y entend résonner l’écho de la canonnade du Marstall les nouvelles écuries royales, Q. G. des « marins rouges » pendant l’insurrection] de Noël 1918 et la fusillade des combats de Spartakus à Berlin. Pour ce qui me concerne, en tout cas, je sais bien que vibre dans ces pages, cinquante ans après, ce profond bouleversement intérieur qui nous faisait alors courir dans les rues, nous retenait jour et nuit aux carrefours et dans les salles de réunion."(A. Sohn-Rethel, Geistige und körperliche Arbeit. Zur Theorie der gesellschaftlichen Synthesis, Francfort-sur-le-Main, Suhrkamp, 1970, p. 8., [cité par Pierre Rusch)

Autour de Sohn-Rethel :

La thèse de Françoise Willmann est disponible en ligne. Françoise Willmann prépare un colloque sur Sohn-Rethel en décembre 2018.
Une recension d’une autre publication en 2010 des textes de Sohn-Rethel est en ligne sur palimpsao.

« Les a priori de la pensée, imaginés par Kant, sont les a posteriori de l’expérience de la monnaie. Suivez le développement de la monnaie depuis l’Antiquité jusqu’à l’après-guerre, vous comprendrez pourquoi l’esprit peut se servir de ce mode si exotique de ­déplacement pour penser tous les objets du monde, depuis l’être de Parménide jusqu’à l’obsession des soviets pour l’automatisation totale. » Article de Bruno Latour dans Le monde des livres – Qui a la parole ? Kant dévoré par Marx


Mercredi 28 mars 19h30 Arpentage de « Figures de la révolution africaine. De Kenyatta à Sankara », un ouvrage de Saïd BOUAMAMA

Atelier de lecture collective de l’ouvrage « Figures de la révolution africaine. De Kenyatta à Sankara » de Saïd BOUAMAMA paru en 2014 aux éditions la Découverte/Zones

Jomo Kenyatta, Aimé Césaire, Ruben Um Nyobè, Frantz Fanon, Patrice Lumumba, Kwame Nkrumah, Malcolm X, Mehdi Ben Barka, Amílcar Cabral, Thomas Sankara…Longtemps regardés avec dédain par ceux qui, depuis les années 1980, décrétèrent la mort du tiers-mondisme et le triomphe du néolibéralisme, ces noms reviennent à l’ordre du jour. Avec l’atmosphère de révolte que l’on sent monter aux quatre coins du monde, ces figures majeures de la libération africaine suscitent un intérêt croissant auprès des nouvelles générations.

Refusant d’en faire de simples icônes, Saïd Bouamama redonne corps et chair à ces penseurs de premier plan qui furent aussi des hommes d’action. Leurs vies rappellent en effet que la bataille pour la libération, la justice et l’égalité n’est pas qu’une affaire de concepts et de théories : c’est aussi une guerre, où l’on se fourvoie parfois et dans laquelle certains se sacrifient. S’il ne cache pas son admiration pour ces figures rebelles, dont la plupart moururent effectivement au combat, Saïd Bouamama n’en fait pas des martyrs absolus : la pensée en action est toujours située, incertaine, inachevée.

C’est pourquoi ce livre s’attache, avec beaucoup de pédagogie, à inscrire ces parcours dans leurs contextes sociaux, géographiques et historiques. On comprend mieux dès lors comment ces hommes, qui ne vécurent pas tous sur le continent africain, mais furent tous confrontés à l’acharnement des puissances impériales, cherchèrent les armes pour sortir l’Afrique de la nuit coloniale et faire émerger une nouvelle universalité.

À l’heure où l’on se demande comment avoir prise sur le monde, ce portrait politique collectif rappelle qu’il a toujours été possible, hier comme aujourd’hui, de changer le cours des choses.

Qu’est ce qu’un arpentage ?

Méthode de lecture collective issue de la culture ouvrière, l’arpentage est un outil d’éducation populaire qui permet la découverte à plusieurs d’un ouvrage, en vue de son appropriation critique.

Remarques : l’auteur de l’ouvrage ne sera pas présent.


Vendredi 30 mars 19h La démocratie des chimères, gouverner la biologie synthétique

Présentation de l’ouvrage « La démocratie des chimères. Gouverner la biologie synthétique » avec l’auteure Sara Angeli Aguiton. »

À contre-courant des analyses qui célèbrent l’avènement d’une « démocratie technique » ou d’une « innovation responsable », Sara Aguiton prend ces labels pour objet d’étude. Quoi que « participatifs », « collaboratifs », « interdisciplinaires » et « réflexifs », les dispositifs de gouvernement de la biologie synthétique sont structurés par des intérêts techno-industriels qui pèsent sur la définition des problèmes et des solutions à mettre en œuvre. Ainsi, le livre permet de comprendre comment les risques induits par la biologie synthétique ont été écartés des dispositifs de régulation : ces dispositifs se sont surtout centrés sur la prévention de la contestation et du terrorisme, deux problèmes qui ne concernent la biologie synthétique que parce qu’ils risquent de freiner son développement. La présentation sera l’occasion de revenir sur ces différents points et d’éclairer le fil conducteur de l’ouvrage, que gouverne-t-on quand on gouverne la biologie synthétique ?

http://www.editionsbdl.com/fr/books/la-dmocratie-des-chimres.-gouverner-la-biologie-synthtique/646/

Sara Angeli Aguiton est docteure en sociologie, spécialisée en études sociales des sciences et chargée de recherche au CNRS. Elle est chercheuse au Centre Alexandre Koyré de l’EHESS.

Note

Les locaux de la Parole Errante appartiennent au conseil départemental (CD) de Seine-Saint-Denis. Le bail se termine toutefois, et le collectif de la Parole Errante demain s’est constitué pour que les suites de la Parole Errante s’inventent à partir de l’existant et surtout à partir de la multiplicité d’initiatives et d’expériences culturelles, sociales et politiques accueillies ces dix dernières années dans ce lieu. Nous ne sauverons l’existant qu’à le réinventer ! Continuons de prendre la parole !

Le Café librairie Michèle Firk est ouvert du mercredi au samedi de 15h à 20h, par un collectif de bénévoles qui y discutent, s’y organisent, et invitent qui le souhaitent à prendre un café, participer, proposer des événements.. On est au 9 rue François Debergue à Montreuil, métro croix de Chavaux.

Mots-clefs : économie politique | livre
Localisation : Montreuil

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