
La lutte ne sera pas sans nous !
Pour des vies libérées de l’exploitation patriarcale, raciste et capitaliste, pour l’égalité des droits et de la dignité, nous appelons le mouvement du 10 septembre à être féministe.
Les dernières propositions de François Bayrou sont alarmantes : suppression de deux jours fériés, dégradation des services publics, restriction du droit au chômage, remise en cause de la Sécurité sociale... Ces attaques visent directement nos droits et toucheront d’abord les femmes et les minorités de genre, surreprésentées parmi les plus précaires.
Nous luttons pour une augmentation de toutes les rémunérations. Pendant la crise de la COVID-19, nous étions en première ligne, dans les secteurs essentiels comme le soin et la grande distribution, souvent payées au SMIC. Et depuis ? Les réformes de l’assurance chômage, des retraites, et les lois travail ont encore creusé les inégalités.
Nous sommes les premie·res concernées par le temps partiel contraint et les carrières interrompues, synonymes de salaires réduits et de précarité économique. En moyenne, nous gagnons 24 % de moins que les hommes, soit un écart de 500 € par mois. À la retraite, la situation ne s’améliore pas : près d’une femme sur trois touche moins de 858 € par mois, une réalité bien plus fréquente que chez les hommes retraités. Par ailleurs, 13 % des femmes sont rémunérées au SMIC, contre 5,5 % des hommes : augmenter le SMIC, c’est augmenter les salaires féminins.
À cette précarité économique s’ajoute la charge du travail domestique. Contre la double journée, nous exigeons une répartition juste et égalitaire des tâches entre tou·tes. Nous assumons encore très majoritairement les tâches pénibles et peu valorisées : ménage, soin des enfants ou des personnes âgées. 68 % des femmes y consacrent du temps chaque jour, contre seulement 43 % des hommes. Les mères isolées sont parmi les plus vulnérables : plus de 40 % d’entre elles vivent sous le seuil de pauvreté.
Pour faire face à cette surcharge, certains ménages aisés délèguent les tâches ménagères à des employé·es précaires, souvent des femmes racisées. Mais cette “solution” proposée par le capitalisme ne nous libère pas : nous voulons une véritable répartition des tâches, où le travail domestique et le soin sont l’affaire de tou·tes.
Nous sommes aussi les premie·res à subir les attaques contre les services publics. D’abord comme travailleur·euses : les secteurs les plus visés, santé, petite enfance, culture, enseignement, sont majoritairement féminins. Chaque coupe budgétaire est une menace pour nos emplois, nos conditions de travail et nos salaires. Ensuite comme usage·res : quand les services publics disparaissent, ce sont les femmes et minorités de genre qui prennent le relais, au détriment de leur autonomie et de leur temps libre. Quand les crèches ferment, ce sont les mères qui arrêtent de travailler. Défendre les services publics, c’est défendre notre autonomie !
Nous défendons aussi les droits des travailleur·euses du sexe, dont les droits fondamentaux sont bafoués. Criminalisé·es, stigmatisé·es, exposé·es à la violence et aux contrôles policiers, elles et ils doivent être écouté·es, protégé·es et soutenu·es dans leurs revendications.
Nous luttons contre le racisme et l’islamophobie, qui empêchent l’accès à une vie digne. Les femmes racisées sont surreprésentées dans les métiers les plus précaires et les moins rémunérés : femmes de chambre, aides-soignantes, agent sociales… quand elles ne sont pas tout simplement exclues de l’emploi.
Après la loi de 2004 interdisant le port du voile à l’école, les mesures se sont enchaînées : interdiction d’accompagner les sorties scolaires, exclusion de la fonction publique… Aujourd’hui, Bruno Retailleau veut interdire aux femmes musulmanes voilées de participer à des compétitions sportives. Ces attaques institutionnelles organisent l’exclusion et la précarisation des femmes non-blanches.
La protection de l’enfance est elle aussi gravement négligée. Et ce n’est pas Bayrou, accusé d’avoir couvert des violences sur enfants à Bétharram, qui y changera quoi que ce soit. Un rapport de l’Assemblée nationale d’avril 2025 décrit la protection de l’enfance comme « un service qui craque de toutes parts ». Les chiffres sont accablants : 160 000 enfants victimes de violences sexuelles chaque année, 400 000 enfants co-victimes de violences conjugales, 200 cas de maltraitance estimés chaque jour. Ces enfants sont trop souvent laissé·es seul·es face aux violences intra-familiales. En raison du manque de moyens, ces enfants deviennent, de plus, victimes de violences institutionnelles.
Parmi les plus vulnérables : les mineur·es non accompagné·es, qualifié·es d’« oublié·es des oublié·es » dans ce même rapport. Arrivé·es en exil, ces enfants sont laissé·es à la rue, sans école, ni toit, ni soins. Pire : ils et elles subissent régulièrement les violences policières lors des expulsions de campements.
Nous affirmons notre droit à l’autodétermination et à une pleine liberté sur nos corps : contraception, IVG, PMA, transitions libres, accessibles et gratuites. Nous nous opposons aux fermetures de maternités et de centres IVG, qui mettent la vie des femmes en danger. En 50 ans, près de 1 000 maternités ont fermé, soit une baisse de 66 %. Résultat sur ces dernières années : la France connaît l’une des plus fortes hausses de la mortalité infantile en Europe.
Nous exigeons un accès libre, gratuit et non pathologisant aux parcours de transition : la garantie des droits des personnes trans dans tous les services de santé, sans discrimination ni refus de soins et également un droit au changement d’état civil libre, accessible, déjudiciarisé et sur le principe de l’autodétermination.
La lutte contre les violences sexistes et sexuelles est au cœur du mouvement social : c’est par la lutte que nous faisons entendre nos voix et exigeons justice. Une femme sur deux a déjà été victime de violences sexuelles. En France, un viol ou une tentative de viol a lieu toutes les 2 minutes 30. Dans 91 % des cas, la victime connaît son agresseur, et dans 45 %, il s’agit du conjoint. En 2025, près de 100 féminicides ont déjà été recensés : l’inaction tue.
Le système de soin, historiquement pensé par et pour les hommes, invisibilise la souffrance des femmes et minorités de genre, normalise les violences psychologiques et physiques qu’elles subissent, ignore la précarité menstruelle et néglige des soins essentiels souvent mal remboursés ou non reconnus. Lutter contre les violences sexistes et sexuelles, c’est aussi dénoncer les violences médicales, souvent passées sous silence, qui perpétuent un système méprisant et maltraitant les corps marginalisés : femmes, personnes racisées, minorités de genre, personnes en situation de handicap... Trop souvent, leur parole est ignorée et leur consentement refusé.
Dans un monde rongé par l’extractivisme et la course au profit, nous affirmons l’urgence de repenser notre rapport à la terre. Le scandale du chlordécone, pesticide ultra-toxique utilisé dans les bananeraies antillaises et pour lequel l’État refuse encore aujourd’hui d’assumer la responsabilité, ou la loi Duplomb, que le gouvernement cherche à imposer malgrès le succès de la pétition contre, sont des exemples de la violence d’un système qui sacrifie les vies humaines et les territoires à la logique du profit. La préservation des sols, aujourd’hui menacés par l’agriculture intensive, l’artificialisation et les pollutions industrielles, est une condition vitale pour la survie des écosystèmes et de la biodiversité. Refusons la logique de marchandisation qui détruit les milieux vivants au profit du racisme et du capitalisme ! Nous luttons pour des productions de subsistance, qui n’ont pas pour but l’accumulation de capital, mais l’autonomie, la solidarité et la vie digne. Préserver les sols, c’est aussi libérer les territoires de l’exploitation, redonner une place centrale aux pratiques collectives et féministes qui nourrissent sans détruire. Défendons une terre vivante, cultivée non pas comme ressource à exploiter, mais comme commun.
Notre outil de lutte : la grève féministe. Le 10 septembre, et après, imposons une lecture féministe du travail et de la société ! Le travail des femmes et des minorités de genre ne se limite pas à l’emploi salarié : il inclut aussi le travail domestique, le soin, la double journée, les tâches invisibles, la charge mentale…
Nous subissons des violences économiques et institutionnelles, ainsi que sexistes et sexuelles. La grève féministe permet de les rendre visibles et de les combattre toutes ensemble.
Organisons-nous collectivement. Créons des réseaux féministes, réfléchissons à comment nous mobiliser durablement sans cesser de prendre soin. Expérimentons la prise en charge collective du travail domestique : cantines, gardes partagées…
Nous reprenons les mots de l’Appel aux citoyennes du 28 avril 1871 : « Dans cette lutte du passé contre l’avenir, de l’injustice contre le droit, insensé qui se croit désintéressé, coupable qui reste neutre »
ENSEMBLE CONSTRUISONS LA GRÈVE FÉMINISTE LE 10 SEPTEMBRE ET TANT QU’IL LE FAUDRA