Le gouvernement vient de supprimer la liberté d’instruction

Zoom sur « Pour une école de confiance », un projet de loi qui prévoit le renforcement des contrôles de l’Instruction En Famille.

Que restera-t-il de la liberté quand celle de choisir quoi et comment apprendre, sera tuée dans l’œuf à partir de 3 ans ?

« Pour une école de confiance » est un projet de loi hautement critiqué par beaucoup de membres de l’éducation nationale. Jusque là rien de nouveau, à part peut-être la procédure accélérée en catimini, Si on s’intéresse de plus près au renforcement de contrôle de l’ Instruction En Famille (IEF) on peut vous annoncer en scoop la mise à mort de la liberté d’instruction.

Avec ce projet, l’éducation nationale souhaite asseoir un contrôle TOTAL sur la façon dont doivent apprendre les enfants en IEF à travers l’obligation de références scolaires (largement contestées et totalement limitantes par rapport à l’article 26 des droits de « l’homme et du citoyen ») et le monopole de l’exercice de celui-ci.

Et pourtant, non, l’école n’est pas obligatoire (c’est l’instruction qui l’est). Nous avons encore le choix de pouvoir nous en passer si nous souhaitons que nos enfants apprennent autrement.
Aujourd’hui, environ 30 000 enfants s’instruisent en famille, une façon d’apprendre ultra minoritaire face aux 8 millions d’élèves scolarisés. Pourtant, cette pratique méconnue paraît tellement dangereuse qu’elle est régulièrement attaquée depuis 1998. Le gouvernement ne veut pas que l’on soustraie des enfants à son autorité, cette liberté en pleine expansion semble être un danger réel pour lui. Il faut plus de contrôles, et ce, le plus tôt possible, dès 3 ans et jusqu’à 16 ans. Les raisons divergent au fil du temps. Ça a commencé par la peur des sectes, puis le terrorisme, et enfin, le radicalisme.

Tout le monde a son mot à dire sur l’école, mais ce n’est rien comparé aux critiques, méfiances et suspicions subies par les parents qui choisissent de ne pas ou plus confier le quotidien de leurs enfants à cette institution. Même dans beaucoup de milieux militants, à priori ouverts aux pratiques autonomes ou alternatives, l’école reste un lieu incontournable, un monument obligatoire, un mal nécessaire par lequel il faudrait quand même passer, où il faudrait se battre pour la rendre meilleure.

L’école est avancée comme la garante de la socialisation. Pour un certain type de socialisation oui c’est vrai. Parquer des enfants par classe d’âge est-ce vraiment une façon pertinente de socialiser ? Les contraindre à être assis·es, concentré·es, pendant 6 à 8 heures par jour entre quatre murs est-ce une façon pertinente de socialiser ? La garante de la lutte contre les inégalités de classes : qui y croit encore ? La garante de la lutte contre les inégalités de genres : ça n’existe plus voyons !

Les parents et enfants IEF sont stigmatisé·es en permanence sur le pourquoi illes ne vont pas à l’école. Alors qu’on ne demande jamais aux parents d’enfants scolarisés quelles sont les raisons pour lesquelles illes y mettent leurs enfants (on ne le demande jamais aux élèves tout court). C’est la norme, elle est censée être naturelle et couler de source, même pour celleux qui refusent les normes ? Cherchez l’erreur, ou plutôt il n’y en a justement pas, ça doit faire partie du formatage scolaire. Ça ressemble à un réflexe qu’on ne peut attribuer à de mauvaises intentions.

Ne pas aimer l’école ou la remettre en cause est courant, mais vouloir s’en passer c’est TABOU.
Pourtant, défendre la liberté d’instruction ce n’est pas être contre l’école.
L’instruction est un droit fondamental.
Chacun·e devrait rester libre de ses choix d’instruction et de pouvoir en changer quand ille le souhaite, quel que soit son âge.

L’être humain est un animal curieux et en soif d’apprentissages dès sa naissance, et tout au long de sa vie, c’est juste inné. L’accompagnement des apprentissages autonomes ou informels apparaît comme une condition fondamentale si l’on souhaite dépasser les rapports de pouvoir et de domination (principe de base de l’anarchie). Essentiel, si l’on veut que chaque être humain puisse se développer de façon intrinsèque. Ce type d’apprentissage ne semble pas compatible, aujourd’hui, dans l’école publique.

La façon dont sont accueillis et accompagnés tous les être humains dans leurs appréhensions et tous leurs apprentissages du monde posent les fondements et orientations de n’importe quelle société.
Préférons-nous l’entraide ou la domination ? La liberté ou le contrôle ?

En vérité, en France, il y a quelques milliers d’enfants et de parents qui n’ont toujours pas trouvé de bonne raison de se/les soumettre à l’instruction linéaire et formelle de l’éducation nationale. Illes exercent leur droit à la liberté d’instruction inscrite dans toutes les déclarations relatives aux droits humains, tout simplement.
Ce choix est motivé par le bien-être, le respect du rythme de vie et d’apprentissage de l’enfant. Ce choix demande toujours un investissement énorme et un total aménagement de la façon de vivre des parents.

Certaines familles, clairement anti-autoritaires, préfèrent que leurs enfants ne subissent pas les violences éducatives, la hiérarchie, le sexisme ordinaire, la compétition qui va avec la résignation aux inégalités (lot lié fatalement à cette institution). Ces familles font clairement le choix de la liberté, de la confiance et du refus du contrôle, celui-ci est inhérent aux rapports basés sur la domination.
Tous les parents pratiquant l’IEF sont loin d’être anarchistes (certain·es ne le savent pas). Beaucoup, pas forcément engagé·es sur d’autres fronts souhaitent simplement accompagner leurs enfants avec bienveillance en respectant leurs choix, besoins, rythmes. D’autres ont retiré leurs enfants du système scolaire parfois après de longues années de souffrance de celleux-ci, ne sachant pas toujours avant qu’il était possible de faire autrement. L’école ne sait pas prendre en charge toutes les différences d’aptitudes de chaque enfant.

Chaque famille est unique et les situations économiques et sociales sont aussi extrêmement variées. Beaucoup n’auront jamais les moyens de payer une école Montessori ou autre école privée alternative à leurs enfants. (Les plus radicales pensent que même si on repeint les barreaux d’une école en rose ça restera une prison...) Beaucoup préfèrent innover et chercher des alternatives à l’école plutôt que des écoles alternatives (en vrai on innove que dalle parce que l’instruction formelle en école date de rien du tout par rapport à la transmission des savoirs et savoirs-faire depuis des millénaires). Il existe plein d’exemples de personnes super trop géniales qui ne sont jamais allé·es à l’école à citer, mais la logique du parvenir ne nous intéresse pas, beaucoup ne sont motivé·es ni par la réussite, ni par le mérite.

Toujours est-il que si cette loi passe, les parents sédentaires, qui refuseront d’enfermer leurs enfants dans une école, quelles que soient leurs raisons, auront intérêt d’être super potes avec le maire de leur commune et de leur inspecteur·trice parce que sinon il risque de ne leur rester que 2 possibilités :

  • Soit les enfants sont programmés à réciter par cœur à l’oral et à l’écrit l’entièreté du programme de l’éducation nationale tous les ans, dans l’ordre, dès 3 ans, (avec des modalité des contrôles scandaleuses et assommantes). Chose à laquelle les élèves scolarisé·es ne sont pas contraint·es.

- Soit les parents refusent de suivre le programme décidé unilatéralement par le ministère de l’éducation, refusent d’obtempérer aux modalités de contrôles imposées unilatéralement par l’inspection académique, doivent payer des grosses amendes, se voient menacer de se faire retirer leurs enfants et/ou vont en prison.

C’est ça le monopole souhaité de l’éducation nationale.
Un brin fascisant non ?

Pour plus d’infos sur la lutte en cours

Collect’IEF rien à déclarer
Pétition citoyenniste pour le recours déposé à la cour européenne des droits de « l’humain »

Vidéo pour l’école de la naïveté

Un témoignage :

« Non à la scolarisation de l’IEF !
Je viens d’apprendre que vous avez décidé d’abaisser l’âge de l’instruction obligatoire de 3 à 6 ans et que par conséquent, des enfants, dès 3 ans, seraient soumis à des contrôles car «  la radicalisation peut malheureusement commencer très tôt  ».
Vous souhaitez donc entrer dans nos domiciles et même de manière inopinée : « En l’état actuel du droit, rien ne fait obstacle à ce que le contrôle soit inopiné. » De quel droit parlez-vous ?
Je ne veux plus être l’objet de vos inquiétudes, le moteur de vos peurs. Je ne suis pas un sujet dont les droits sont inscrits dans des Lois que vous balayez d’un revers de la main au nom des exigences d’une réalité que vous avez créée.
Je ne suis pas dans l’urgence. Il n’y a rien d’exceptionnel à laisser le temps faire son œuvre dans le développement d’un enfant. Il n’y a aucune nécessité à contraindre un enfant à grandir pas plus que l’on ne contraint la vie à s’expandre.
J’ai observé, depuis que nous sommes extraits du carcan scolaire, que tout dans l’enfant tend au plaisir. Il est dans l’instant tout entier propulsé, les sens accaparés par ce qu’il fait. Il fait et il est. Il est et il fait. Il ne dit pas « Je suis et je fais ». Non, les deux sont liés. Il est ce tout engagé dans le processus de la Vie. Je veux être celle qui laisse les champs ouverts à ses investigations en interférant le moins possible.
Je veux qu’il découvre le monde en dehors des peurs, des inquiétudes, de toutes ces anticipations inutiles que l’on projete sur lui, alors qu’il est tout consacré à la Joie de son propre devenir.
Il n’y a pas d’école de la vie. L’école est un bien artificiel créé par la nécessité du pouvoir de soumettre tous les sujets. Elle n’arme pas contre les peurs, elle prépare les sujets à les nourrir pour entretenir le système et le maintenir sous contrôle.
Vous avez imposé un mode d’emploi qui détermine la progression de tous les enfants à un seul et même rythme, à des «  attendus de fin de cycle successifs  ».
Je continuerai à ne pas soumettre l’enfant à ce qu’il n’est pas, lui qui magnifie l’imprévisible, lui qui se joue d’un temps que l’on pense linéaire.
Vous voulez le soumettre à vos prédictions, à vos attentes, à vos programmes mais pour l’y contraindre, il faut tuer en lui tout ce qu’il est et qui n’a que faire de vos prédictions, de vos attentes, de vos programmes.
Avez-vous seulement observé un enfant à qui l’on ne demande rien ? Un enfant qu’on laisse aller où la vie le pousse. Je ne parle pas d’un enfant confiné dans quatre murs. Je parle d’un enfant confié à la Nature et que l’on accompagnerait d’un œil confiant.
Je ne soumettrais pas mes enfants à la programmation que vous leur avez déterminée. Vous n’aurez donc rien à contrôler.
Vous vous déclarez le garant du droit à l’éducation de l’enfant.
Je vous garantis que j’ai mis et continue à mettre toutes mes forces vitales dans l’accompagnement du processus de développement de mes enfants.

Puisque je sens qu’il le faut, je vous dégage de toute responsabilité à leur égard.
Ne croyez pas que je ne doute pas parfois mais ce doute fait partie de l’éducation que j’ai reçue et non de la Vie qui nous est offerte.
Ne croyez pas que mes enfants soient en dehors de la réalité parce qu’ils sont tout entier consacrés à leur propre vie. Ils sont aussi tout entier dans la réalité qui les entoure.
Ne croyez pas que mes enfants ne soient pas au courant de la manière dont se conduit le monde, ils sont juste en train d’y penser en termes de solutions.
Et je vous garantis qu’il leur faut faire preuve de beaucoup de constance et de persévérance.
Il leur faut aussi entretenir une grande confiance en eux pour défaire une réalité qui bien souvent se plaît à poser des obstacles là où il ne devrait y avoir que les moyens mis en œuvre pour tous les possibles.
Un enfant que l’on confine dès son plus jeune âge n’est plus à même d’être ce qu’il est. Il se plie, il se tord voire il se casse comme la Vie que l’on contraint. Et il s’agit bien d’user de la contrainte pour le tenir quasi immobile.
Si vous ne voyez pas ce que les enfants deviennent chaque jour dans les classes, les statistiques, elles, vous le disent. Et malgré vos souhaits de réformes, les budgets insolents, tout indique que rien ne s’arrange, et au contraire, que cela ne cesse d’empirer.
La montée de la violence en milieu scolaire vous crie ce que vous ne voulez pas admettre.
Ne croyez pas que je nie le poids des réalités qui pèsent sur nos enfants en devenir.
Ne croyez pas que je nie les effets des violences multiples que nous exerçons sur le cerveau de nos enfants, les conséquences sur leur maturation émotionnelle et physique.
Ne croyez pas que je pense ne pas y avoir ma part.
Je le reconnais et je m’efforce aussi de ne pas porter plus que la culpabilité que l’on renvoie sans cesse aux seuls parents.
Je vous en prie puisqu’au moins vous ne niez pas les statistiques, ne justifiez pas le système qui les produit en le renforçant par des mesures de plus en plus coercitives.
Pas plus que je ne les ai acceptées quand mes enfants fréquentaient l’école, je n’accepterai que vous les transposiez aux choix éducatifs que nous avons faits pour nos enfants.

Je n’accepterai donc pas d’être votre complice. Je dois au moins cela à mes enfants.
Je n’accepterai donc pas que mes enfants se soumettent à vos attentes, à vos contrôles inopinés contraires aux droits les plus fondamentaux. »

Mieux connaître l’IEF

Les principales associations regroupant les familles IEF
Les enfants d’abord
Libre d’apprendre et d’instruire autrement
association OCIEL
Collectif lumière sur l’IEF

Note

Les mauvaises langues disent que le gouvernement n’est pas animé par une volonté de contrôle de la liberté. Après études des chiffres, (effectifs et données démographiques) il s’avérerait que l’éducation nationale aurait besoin de ces 30 000 nouveaux élèves pour remplir ses établissements.
Si c’est le cas, nous pouvons lui suggérer de lâcher la grappe aux non-sco et d’essayer d’améliorer les conditions de travail et d’instruction des personnes qui font vivre et bénéficient de ce service public dans le respect qui leur est dû.

Mots-clefs : pédagogie

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