En grève jusqu’à la retraite !

Appel du Collectif prolétarien pour la grève générale illimitée.

« Il faut dire aux Français clairement et tranquillement que nous allons travailler plus longtemps. »
Édouard PHILIPPE, Premier ministre, 21 novembre 2019

« Le système de retraites par points, en réalité, ça permet une chose, qu’aucun homme politique n’avoue : ça permet de baisser chaque année le montant des points, la valeur des points et, donc, de diminuer le niveau des pensions. Voilà. »
François FILLON, 9 mars 2016

En affirmant le 16 novembre dernier à destination d’une Gilet jaune « nous ne sommes pas dans le même camp, madame » , le préfet de police de Paris, LALLEMENT (sic), aura sans doute — bien involontairement — contribué à éclairer jusqu’aux plus naïfs quant à la polarisation de la situation sociale en fRance. Car s’il y a plusieurs camps en présence, c’est bien qu’il y a une guerre : celle que la bourgeoisie mène, avec une intensité accrue depuis l’arrivée au pouvoir de MACRON, contre toutes les conquêtes sociales arrachées en deux siècles de luttes ouvrières.

Après des attaques contre le droit du travail en ce qu’il peut avoir de protecteur pour les salariés, contre le statut de la fonction publique ou encore contre les conditions d’indemnisation du chômage – et en parallèle de grossières manœuvres de diversion stigmatisant les immigrés – les kamikazes de LREM envisagent désormais une énième « réforme » des retraites. Les précédentes réformes de 1993, 2003, 2007, 2010 et 2014 ont pourtant déjà entraîné un durcissement drastique des conditions d’accès à la retraite doublé d’une baisse du montant moyen des pensions versées, notamment via l’augmentation du nombre d’années pris en compte pour le calcul du salaire de référence, l’augmentation de la durée de cotisation requise pour bénéficier d’une retraite à taux plein et le relèvement de l’âge minimum d’ouverture des droits à la retraite.

Mais, outre sa forte dimension symbolique (i.e. infliger une défaite majeure à 25 millions d’exploités), le passage à un système de retraite par points marquerait un saut qualitatif dans la régression sociale. En effet, un tel système signifie concrètement que :

— > le montant des pensions servies aux retraités deviendra une simple variable d’ajustement de l’équilibre financier global du système de retraites au nom d’une règle d’or inique plafonnant les dépenses de retraites à un niveau maximum de 13,8% du PIB ;

— > l’allongement de l’espérance de vie entraînera une diminution mécanique du coefficient de conversion des points accumulés, forçant les exploités, tels des hamsters dans une roue, à choisir entre la peste et le choléra : ou bien repousser sans cesse leur départ en retraite à mesure que le coefficient de conversion des points se déprécie ou bien cesser le turbin plus tôt au prix d’une retraite largement amputée ;

— > dans ces conditions, le potentiel maintien d’un « âge légal de départ en retraite » devient donc purement formel puisque, eu égard au niveau de leurs pensions en cas de départ à 62 ans ou avant, la majorité des prolétaires seront contraints de travailler au-delà de cet âge dans l’espoir de s’assurer un niveau de (sur)vie correct. À terme, l’objectif est de contraindre des exploités historiquement hostiles à la retraite par capitalisation à devoir y recourir en guise de nécessaire complément aux maigres subsides issus du système par points… pour le plus grand profit des milieux financiers (assureurs, fonds de placement) qui ont largement appuyé l’arrivée au pouvoir de la clique des marcheurs au pas de l’oie.

Réclamée par le MEDEF, cette réforme des retraites est également largement inspirée par l’OCDE — dont le rapport France, mieux travailler avec l’âge, paru en 2014, recommandait de renforcer les incitations à travailler plus longtemps, notamment en changeant les limites d’âge dans le secteur public. De fait, les réformes des retraites menées dans les différents pays de l’OCDE ces dix dernières années ont abouti à une forte réduction de la part des pensions financées par la collectivité. Cette réforme s’inscrit, en outre, dans la ligne de la politique de l’Union européenne en faveur du « vieillissement actif » affirmée dès 2001 lors du sommet de Stockholm (objectif d’une hausse du taux moyen d’emploi des 55-64 ans) et complétée depuis par la « stratégie de Lisbonne » et par la stratégie « Europe 2020 » (objectif d’une augmentation de l’âge moyen de liquidation de la retraite des salariés).

Face à cette attaque d’ampleur contre le salaire différé, toute riposte prolétarienne sera inéluctablement vouée à l’échec si elle ne parvient pas à s’extraire de l’opposition spectaculaire entre le pouvoir et les syndicats. Ces derniers, en laquais serviles de la bourgeoisie, se divisent en effet principalement entre :

— > Ceux qui, à l’instar des ordures finies de la CFDT et de l’UNSA, soutiennent ouvertement la réforme des retraites ;

— > Ceux qui, tels la CGT, FO, la FSU, prétendent la combattre, mais qui en discutent les modalités et le contenu depuis l’élection de MACRON… Discussions formelles principalement destinées à convaincre les rupins enragés de LREM de l’utilité des syndicats en tant que partenaires sociaux crédibilisant la fiction de la « démocratie sociale », car, de l’aveu même d’Yves VEYRIER, bureaucrate en chef de FO, « on nous concerte sur quelque chose qui est déjà décidé ».

Dans la mesure où les bourges et les syndicats à leur botte savent, de longue date, que des grèves contre leur réforme des retraites seront inévitables, ils ont eu tout le loisir de rédiger un scénario de la débâcle prolétarienne qu’il s’agira donc de contrecarrer. Il convient en particulier de dénoncer ce jeu de miroirs à vocation paralysante entre le gouvernement et les syndicats :

— > D’un côté, dans le but de circonscrire au maximum le périmètre de la grève démarrant le 5 décembre et de briser préventivement toute forme de solidarité envers les travailleurs en grève, le gouvernement et ses organes de propagande présentent les grèves à venir comme étant « très corporatistes » et menées par des « syndicats qui défendent des régimes spéciaux » (A. BUZYN, ministre de la Santé) ;

— > De l’autre, venant avaliser les éléments de langage des bonimenteurs sous Captagon® de LREM, la CGT & co donnent des gages à peu de frais à leurs bases en soutenant des grèves reconductibles dans des secteurs prolétariens assurément symboliques — mais surtout très minoritaires (cheminots, agents RATP) ! – tout en faisant le pari que le reste du prolétariat se contentera sagement d’une grève carrée de 24 heures et retournera trimer dès le 6 décembre… Or c’est justement à ces mêmes maîtres tacticiens de la déroute prolétarienne (CGT Cheminots, SUD-Rail) que les cheminots doivent l’échec de leur lutte – longue, mais maintenue volontairement isolée par les syndicats – contre la disparition de leur statut au printemps 2018.

Du reste, si la police en chasubles rouges ne suffit pas, le pouvoir pourra toujours — dans la lignée de la répression féroce du mouvement des Gilets jaunes et des meilleures dystopies de George ORWELL — s’appuyer sur celle en uniformes bleus. MACRON exigeant une condamnation préventive des violences du 5 décembre, le secrétaire d’État DJEBBARI affirmant la « vigilance » du gouvernement « sur les aspects d’ordre public » ou encore CASTANER demandant une non-application de la réforme des retraites aux flics… tout ceci démontre la détermination du Pouvoir à rééditer la formule politique qui a fait florès lors de la réduction du mouvement des GJ : une alliance objective entre le gouvernement LREM et le RN — par le biais de forces répressives obéissant docilement au premier tout en étant massivement acquises aux idées du second.

Les obstacles sur la voie de l’émancipation sont encore nombreux, mais, à l’image de nos sœurs et frères de classe qui se soulèvent actuellement de l’Irak à Hong Kong, de la Colombie jusqu’en Algérie, l’heure est venue de noyer la bourgeoisie dans l’eau glacée de ses calculs égoïstes :

Engageons-nous dans la grève générale illimitée !
Chassons les bureaucrates et bloquons tout !
Organisons dans toutes les boîtes des assemblées générales souveraines et des comités de lutte !
Mettons en place des caisses de grève et des coordinations !

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