9 Mars & Co… Réintroduire une perspective révolutionnaire aux mouvements sociaux

Il ne s´agit plus d´un malheureux code du travail à défendre, il ne s´agit plus de nous essouffler inutilement.

Il s´agirait plutôt de réintroduire une perspective révolutionnaire aux mouvements sociaux, question de l’autonomie, de l’action directe, du refus de la médiation, blocage, occupation, sabotage, tout ce patrimoine de guerre de classes dont nous a dépouillé la bourgeoisie, prônant pour nous le dialogue social, la merguez syndicale ou le référendum.

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La lutte est le mythe de toutes nos résignations.
L’histoire en est ôtée, ne restent que des noms propres et des figures de styles.

Mille départs, mille défaites, deux mille amnésies…

L’acte ne supporte plus aucune histoire, il ne sait que se supporter lui-même, narcissisme triomphaliste pour les méta-récits de l’impuissance.

Nous nous aimons dans l’action, comme dans le miroir biaisé de la distinction particulariste.

Nous collectons les histoires d’autres mondes, les anecdotes de l’incendie, puis les silences rongés de nostalgie rance…

jusqu’à la prochaine soupe populaire,
la future date d’un calendrier militant dépourvu de toute perspective majeure…

À notre gauche, la postmodernité morcelle, académicisme moins pensant que pesant.

Rhétorique sociologisante, éditeurs de la confusion et vomissure agnostique au fronton d’une insurrection des conduites aussi pathétique qu’invraisemblable. De l’articulation à l’écartèlement, la désunion splendide rythmée par nos prêcheurs de spécificités.

À notre droite, les errements de l’animosité font des sujets les plus frêles les cibles de leur chagrin.

Leur regard se porte sur tout ce qui peut encore passer sous leur semelle, et lorsque leur petite bravade chamaille les hauteurs, c’est pour y découvrir de l´occultisme et des cabales, des moulins sionistes, de la décadence et une incontestable tendresse pour les régimes autoritaires non-occidentaux.

Et nous…

L’agenda de la bourgeoisie internationale creuse nos crânes de mille manières, éventre les contrées où nous coexistons, nous impose le caprice ou l’austérité, la mort, la prison, l’ennui ou le salariat.

Et nous ?

Les exploités n’existent plus que dans les bouquins d’histoires.

La classe a pris part au folklore des hypothèses, elle est une des fables - venus des périodes maudites du discernement - qui ne peuvent que répugner les adorateurs de micro-structures, de révélations béates et d’abstractions relativistes.

"L´être ensemble" se reconstitue sur les lieux de culte, dans le sport, la réaction, sur l’identité ou à la campagne, chez les fils et les filles de nantis…nous en sommes là.

Et pourtant, ce recroquevillement exprime magnifiquement tout ce manque de commun qui est nôtre.

Le besoin de traduire cette intuition en analyse, en perspective puis en acte - avant la victoire des passions et du ressentiment, avant la mystique et l’esthétisation autoritaire – est d’une évidente nécessité.

Notre ère, de confusion et de défiance, devrait faire se précipiter les foules mécontentes vers les idées anarchistes, communistes, révolutionnaires, avec la fascination et la curiosité de l’enfance, pourtant rien…d’éternelles platitudes :

Le terme anarchisme n’est qu’un dérivé de sigle à connotation barbare, entre le chaos et l’offense,
l´imbécillité puérile dans le mégaphone braillard de l’anticonformisme.

Romantisme et rebellion en dilettante.

Le communisme ? Un goulag réaliste pour un ciel sans étoile ; une seule, rouge sang.
Paysannerie analphabète, ouvrier harassé et théoricien de bibliothèque, se laissent pousser la barbe afin de célébrer leur maître.

Iels prient, l’avènement d’un autoritarisme à visage humain.

Voilà l´héritage de 200 ans d’histoires révolutionnaires…

Car même le terme révolution s´est absenté de notre vocabulaire, nous le murmurons, entre la honte et la clandestinité, apeurés que nous sommes de semer la désolation, phonétiquement.

Le terme révolution est "la quintessence du réactionnaire", c’est bien ce poncif éclairé que nous lègue tous nos nouveaux mollahs de la révolte.

« Construisons autant d’archipel que de temples, autant de territorialités que de spiritualités nouvelles, intensifions la pratique autonome de l’amour et de la joie dans les « jardins séparés » de nos précarités luxuriantes. »

La nullité se présente ainsi, sous la forme de petite factions groupusculaires pleines de névroses protocolaires, de rituels clairvoyants savamment segmentés par l´idéologie.

Nos survivances sectaires expriment toute notre incapacité à formuler autre chose que de la résistance…
Et l’esprit mythifié des occupations de la Loire-Atlantique démontre bien cela.

Notre "zone d’autonomie définitive" est doucement devenu une "zone à défendre"…
Et ce glissement sémantique - que l´on peut bêtement rendre au dérisoire - n’est pas innocent.
Il est révélateur de positions dont témoigne tous les mouvements sociaux :

de l’affirmative à la sauvegarde,

d’une assurance irrévocable à l’instinct de conservation,

d’une continuité historique d’un mouvement - des Zat au Zad, au travers d’une temporalité précise et de son déploiement - au grand surplace de la protection.

Néanmoins, ces espaces permettent de reconstituer du symbole, un renouveau de la figure du conflit, une inspiration, en somme, pour les batailles en devenir.

Un moment historique se présente, et l’incrédulité populaire devrait pouvoir appuyer nos combats.

Tous les jours, la militarisation progresse sans qu´aucune riposte d´ampleur ne survienne.
L’Europe approfondie ses douves, technicise ses geôles, biométrie, répression, barbelés, charter.
La crise ne recule pas, les mouvements réactionnaires bourgeonnent, les hotspots fleurissent , la police expulse, la justice criminalise, l’instabilité géopolitique nous ordonne déjà l’assaut de nouveaux territoires à féconder de misère…

Rien ne sert de dépeindre un présent plus monstrueux encore qu´il ne l´est. Nous ne sommes pas les scribes d´une énième apocalypse d´ultra-gauche, et nous n´affronterons pas ces temps avec la force héroïque du prophète. Il n´y a pas d´apocalypse, il y´a une conjoncture qui peut nous être favorable.

Il ne s´agit plus d´un malheureux code du travail à défendre, il ne s´agit plus de nous essouffler inutilement.

Nous connaissons le raisonnement politique à l´oeuvre : amorcer une grogne par une réforme de quinze pieds, parvenir à la faire reculer de dix avec satisfaction, pour consentir finalement à sa mise en application progressive ; sinistre félicité.

Loin d´être une fin en soi, ce type de mobilisation reste une opportunité supplémentaire, l´occasion de dévellopper un autre discours, pour une autre pratique de l´opposition, une autre culture de l´affrontement.

Naïveté exclue, cette occurrence peut donc nous permettre de réinvestir le front des mouvements sociaux qui viennent, et viendront de nouveau. Elle peut nous permettre de réintroduire de l´histoire et du sens.

Réintroduire une perspective révolutionnaire aux luttes, question de l’autonomie, de l’action directe, du refus de la médiation, blocage, occupation, sabotage, tout ce patrimoine de guerre de classes dont nous a dépouillé la bourgeoisie, prônant pour nous le dialogue social, la merguez syndicale ou le référendum.

L’incompétence des pouvoirs publics n’en surprend que peu, et tous les indécis-es, tous les sans le sou déçu-es, tous les insouciant-es lassé-es du sens dessus dessous, cherchent un camp, un programme, une issue.

Mais ce contexte est aussi propre à l’adversité, à l’enfantement de valeurs archaïques, ce en quoi nous nous devons d’affirmer des positions aussi précises qu’implacables.

Nous avons encore le luxe du dialogue, mais nous n’avons plus celui de l’ambiguïté.

L’incertitude ne dément pas, les haussements d’épaules sont nombreux, l’exaspération est palpable, mais toute cette insatisfaction n’est rien sans l´horizon d’un commun.

Lorsque ce scepticisme s’abat sur la démocratie représentative ou sur « UMPS », nous répétons vouloir abattre tous les POUVOIRS.

Lorsque ce renoncement médit le néo-libéralisme ou la finance internationale, nous serinons CAPITAL ET ARGENT.

C’est une guerre syntaxique, aussi.

Il n’y a pas de peuples, il n’y a que des classes aux intérêts contradictoires.
Il n’y a pas d’élite, d’oligarchies, il n’y a que des petites, moyennes, grandes et hautes bourgeoisies.
Il n’y a pas de complots, il y a des avancées, des croisades, des opérations stratégiques.
Il n’y a pas de patrie, il y a un monde séparé pour les uns, ordonnés par les autres.
Il n’y a pas de réformes, d’insurrection, de guerre civile, il y a la révolution.

Il est évident que la maîtrise du réel passe par la maîtrise des signes qui le représente,
ce que les confusionnistes pratiquent déjà avec une certaine subtilité.

À nous et à nos prétentions obstinées, d’influencer les méandres de l’époque.

Note

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