[Présidentielle 2017 - 1er tour] L’important score du FN dans les casernes de gendarmes mobiles et gardes républicains

Le résultat du 1er tour de l’élection présidentielle montre une nouvelle fois l’attachement des gendarmes au vote Front National. Analyse non-exhaustive des résultats du scrutin de quelques casernes de gendarmes mobiles et gardes républicains.

Gendarmes mobiles durant la « Marche pour la Dignité ». Paris, 19 mars. LaMeutePhotographie

Au gré de multiples études, l’adhésion électorale des gendarmes envers le FN ne fait guère plus de doute. Sur Paris Luttes Info, l’analyse des scrutins du 1er tour des élections régionales de décembre 2015 avait également fait observer cette tendance. Le 1er tour de l’élection présidentielle ne déroge pas à la règle. Les gendarmes votent bien davantage Marine Le Pen que le citoyen lambda.

Avant d’expliciter l’analyse des scrutins, il est judicieux de refaire un point méthodologique. Contrairement aux CRS, "les gendarmes mobiles résident avec leurs familles dans les locaux de la caserne. La concentration de ces effectifs « gendarmiques » offre ainsi une possibilité de pouvoir évaluer la réalité du vote" en étudiant le bureau de vote qui leur est attribué lors d’une élection. Néanmoins, et à part de rares exceptions, le bureau de vote n’est pas lié exclusivement à une caserne mais englobe plus largement les habitations des alentours et donc l’ensemble d’un quartier (dont la caserne). Le résultat du bureau de vote lié à une caserne se dilue donc avec celui des populations civiles "classiques". Il ne s’agit donc pas ici de sondage ou d’estimation mais bien d’une étude mathématique des bureaux de votes rattachés aux casernes.

En Ile-de-France, les gendarmes mobiles et gardes républicains ont voté massivement Marine Le Pen.

  • Versailles : C’est dans cette grande ville des Yvelines que se trouve le plus important contingent de gendarmes mobiles franciliens. Ces gendarmes habitent à la caserne de Satory [1] et est composé de 7 EGM (escadrons de gendarmerie mobile). Ce camp militaire est relativement exceptionnel pour notre étude car il est rattaché à un bureau de vote où seuls les gendarmes et leurs familles respectives sont inscrits sur les listes électorales. C’est le bureau de vote n°10 de Versailles. Dimanche dernier, 48,27% y ont voté Le Pen contre 9,8% pour l’ensemble de la ville. Les gendarmes ont ainsi voté près de 5 fois plus pour le FN que la population versaillaise totale.
  • Paris : Le bureau n°46 du 13e arrondissement correspond aux habitations du boulevard Kellermann dont dépend la caserne des gardes républicaines et leurs familles. L’analyse du scrutin doit prendre en compte cette "dilution" avec les populations "classiques". Malgré ce mélange, Le Pen obtient près de 16,52% des voix soit un score en pourcentage 2,5 fois plus élevé que l’ensemble de l’arrondissement [2].
  • Dugny : Petite ville de Seine-Saint-Denis à la frontière du Val d’Oise, elle est habitée par l’EGM 22/1 dans la caserne De Rose. Les pandores votent au bureau de vote n°1 (Nelson Mandela) avec une partie de la population. Ici encore, malgré cette "dilution", ce bureau détient le nombre de votes le plus élevé pour le FN. Près de 31% contre 18% à l’échelle municipale.
  • Rosny-sous-Bois : Composé de deux EGM (dont un a été inauguré par Cazeneuve en 2016), le Fort de Rosny vote à la maternelle Raspail (bureau de vote n°23) et encore une fois, le Front National fait une percée dans ce bureau (mélangé avec la population civile). Le Pen obtient 24,16% contre 15,14% pour l’ensemble de la ville.

Même si cette étude francilienne n’est pas totalement exhaustive [3], cette sélection relativement importante démontre une nouvelle fois la proximité idéologique entre les tenants de la matraque et le parti d’extrême-droite du Front National.

Gendarmes mobiles protégeant le congrès du Front National à Nantes le 25 février dernier

Nous avons également étudié d’autres bureaux de vote à proximité d’une caserne de gendarmes mobiles ailleurs qu’en région parisienne. Là encore, le constat est saisissant.

  • Orléans : À Orléans réside l’escadron de gendarmerie mobile 41/3 dont la caserne est située boulevard Marie Stuart. Mélangé avec d’autres habitations, l’escadron vote au bureau n°39 et c’est dans celui-ci que le FN de Le Pen obtient son meilleur score ! L’ensemble de la ville a voté à 11,99% pour la candidate tandis que le bureau rattaché à la caserne lui gratifie 23,70% des suffrages, soit près du double...
  • Annecy : Il s’y trouve l’EGM 22/5 dont la caserne vote au bureau n°25 (gymnase de La Plaine). Le score est « dilué » avec les autres populations du quartier encore une fois mais il n’empêche que c’est dans ce bureau de vote que Le Pen obtient son meilleur score ! Près de 29,44% contre 14,03% à l’échelle municipale, soit deux fois plus !
  • Grenoble : L’EGM 24/5 vit dans une caserne avenue Léon Blum. Les gendarmes et leurs familles votent au bureau n°4072 (Beauvert-2). Là encore c’est un bureau mixte regroupant les « Bleus » et populations du quartier. Ce bureau met Le Pen en tête avec près de 28,11% tandis que la ville place Le Pen en 5e position avec « seulement » 10,70% des suffrages.

Ainsi, l’étude des résultats électoraux détaillés des villes où résident des EGM montre une augmentation du score FN dans le bureau de vote correspondant à leurs casernes. Malgré une « dilution » avec les populations avoisinantes du quartier, le score n’en reste pas moins élevé, et se retrouve quasi systématiquement supérieur à celui de l’échelle municipale. La comparaison avec le score de l’ensemble de la ville permet de constater un pic de votes FN « anormalement » élevés dans un bureau rattaché à une caserne de gendarmerie mobile. De toute évidence, si l’on pouvait connaître uniquement les votes des gendarmes (c’est à dire sans prendre en compte les populations civiles partageant le même bureau de vote), le score du FN apparaîtrait encore plus élevé comme nous l’avons illustré avec le cas exceptionnel du bureau de vote n°10 de Versailles « chimiquement » pur car uniquement composé des gendarmes mobiles et leurs familles.

Affirmer la proximité idéologique des gendarmes mobiles avec le Front National n’est en aucun cas un « fantasme » gauchiste. Leurs idées sont bel et bien de la même couleur que leurs tenues de maintien de l’ordre : « Bleu Marine ». CQFD.

Gendarmes mobiles à la manifestation parisienne du samedi 22 mars « 1er tour social ». LaMeutePhotographie

Marc Piccolo et Jeanne Debuis.

Note

Cette succincte analyse ne cherche pas à sous-entendre qu’un gendarme mobile ayant voté autre chose que Le Pen est un « gentil flic » ou un « gendarme respectable ». Il s’agit uniquement ici d’essayer de démontrer par A+B que le gendarme est bien souvent un électeur d’extrême-droite. Peu importe sa préférence électorale, le gendarme reste un tenant de l’ordre établi.

Notes

[1Arrêtée pendant la répression de la Commune de Paris, Louise Michel, militante anarchiste, a été une détenue de ce camp militaire.

[2Marine Le Pen fait 4,99% sur Paris.

[3À l’heure de la rédaction de cet article, nous n’avons pas accès aux résultats détaillés des bureaux de vote des villes de Drancy, Maisons-Alfort et Melun où se trouvent d’autres casernes d’EGM.

[4Seul un autre bureau de vote fait très légèrement mieux mais avec un nombre de votants plus restreint.

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