Précarité et aliénation

Avec le chômage de masse, l’État nous a pondu nombre de contrats d’insertion... Qu’en est-il du rôle réel de ces contrats ? Et des structures qui les utilisent ?

Les chômeurs de longue durée connaissent sans doute les contrats d’insertion. CUI/CAE/CDDI. Ceux-ci s’adressent aux publics précarisés, fragiles, difficilement employables.

Leur but est souvent d’initier à un métier ou de renouer avec « le monde du travail ». Les postes peuvent être intéressants, l’ambiance préférable à celle de nombre d’entreprises conventionnelles... mais doit-on pour autant accepter la position dans laquelle ils nous mettent ?

Pour les réactionnaires bourgeois, le chômage serait presque dû aux chômeurs. Ils ne sont pas motivés, ne font pas d’efforts, sont fainéants. Des parasites de la société. Il conviendrait donc de cesser de les « assister » pour qu’ils se remettent un peu au boulot.

La pauvreté abyssale de cette vision, ce décalage total avec la réalité économique et sociale que nous connaissons tous, et le populisme qui l’enveloppe sont une évidence.

Mais les structures qui proposent d’aider les chômeurs en les remettant au travail, sur des postes financés par les régions, départements ou communes, sont-ils réellement plus positifs ?

Cette politique Keynesienne, souvent vue comme progressiste par rapport au libéralisme crasse qui laisserait bien mourir tous les chômeurs au fond d’une ruelle, peut tout au plus palier aux problèmes inhérents au modèle capitaliste.

Le vice peut aller jusqu’à employer des techniques de production très peu efficaces, voire carrément obscurantistes, histoire d’employer plus de main d’œuvre et occuper les petits chômeurs. Je fais l’expérience d’une association employant des ouvriers agricoles sur une exploitation en biodynamie. Avec la biodynamie, vous financez non seulement une entreprise sectaire, l’anthroposophie, mais vous pouvez aussi demander à un salarié d’asperger des champs avec une solution n’ayant rien à envier à l’homéopathie...

Passer une heure à vaporiser de l’eau améliorée d’une cuillère onéreuse de « silice de corne » pour permettre une « meilleure relation avec la périphérie cosmique, avec le cosmos tout entier » du champ, le tout avec de l’argent public, c’est possible !

Après tout, la vente des produits certifiés Demeter (label de la biodynamie) rapporte gros, et tant mieux si ça permet d’employer pour pas un rond des prolétaires à faire une activité débilitante. Surtout quand ce n’est même pas la structure qui paie la main d’œuvre. Ces pratiques nuisent aussi au développement d’une agro-écologie scientifique.

J’appelle tous les employés précaires en « réinsertion par l’activité économique » à dénoncer ces mascarades et les injustices habituelles du salariat qu’ils rencontrent.

Vu comme des cas sociaux par les encadrants de ces structures, n’étant pas aussi bien protégés que des employés en CDI, les salariés en réinsertion professionnelle peuvent se trouver méprisés, se voir non payer des heures, des jours ou des arrêts maladie...

Il est difficile pour un précaire de se révolter contre cette situation, car il a souvent une mauvaise image de lui-même, alors qu’il n’est pas responsable de l’état du monde du travail, et que sa force de travail rapporte à ceux qui l’exploitent.

Syndiquons-nous, soyons solidaires contre la hiérarchie, remettons en cause les choses et faisons notre possible pour nous émanciper, montrer que nous pourrions être beaucoup plus utiles en maitrisant notre activité. Reprenons le contrôle de nos vies face à ceux qui nous méprisent, nous infantilisent et nous exploitent sous couvert d’une charité bien mal placée.

Mots-clefs : chômage | autogestion

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