La grenade de désencerclement fait un blessé grave ce jeudi 26 mai

Chaque journée de manifestations contre « la Loi Travail et son monde » voit son lot de violences policières. La mobilisation du 26 mai n’y a donc pas échappé et la police a blessé très grièvement une personne à Paris ce jeudi.

Une enquête a été ouverte par le défenseur des droits tandis que la police tente de minimiser sa responsabilité plus qu’évidente. A ce jour, aucune autre « enquête » n’a été ouverte pour les centaines d’autres blessés par la police ces dernières semaines.

Partout en France, la Police réprime durement les manifestations actuelles. À Caen, Toulouse ou Paris, des enquêtes administratives de l’IGPN (la « police des polices ») ont été lancées après la diffusion sur les réseaux sociaux de vidéos compromettantes pour les forces de l’ordre.

À Paris, la répression était encore au rendez-vous ce 26 mai. Il y a d’abord eu cette nasse rue Chaligny durant laquelle la Police a abondamment et dangereusement fait usage de grenades lacrymogène et de grenades de désencerclements. L’air était irrespirable, les gens étaient pris en étau entre deux rangées de forces de l’ordre. Certaines personnes ont fait des malaises, d’autres se sont allongées par terre tandis que certaines ont réussi à trouver un peu de répit dans quelques halls d’immeubles.

Avant Nation, deux flics en civil sont dégagés au niveau de la Cour Saint-Eloi. Un des flics brandit alors son pistolet et met en joue les manifestant-e-s. Est-on (encore) passé près d’un drame ? Que faisaient ces deux flics en plein cortège ?

Arrivé-e-s à Nation, la place est coupée en deux par les gendarmes mobiles. S’ensuivent des salves de grenades « habituelles » ainsi que diverses charges ultraviolentes par différentes unités. Bousculades, tabassages, arrestations. Tout le monde est potentiellement une cible pour les pandores.

Dégagés bon gré mal gré de la place de la Nation, les gens se regroupent alors derrière le cordon de CRS au niveau de l’Avenue du Trône. La Police fait encore une fois usage de gaz lacrymo et les manifestants s’enfuient direction porte de Vincennes. Une manifestation « sauvage » bon enfant a lieu mais ne va pas très loin, à peine quelques centaines de mètres. La Police intervient au niveau du métro « Porte de Vincennes » (ligne 1), matraque à tout-va et descend même sur le quai du métro chercher un jeune qui s’y était réfugié...

L’arrestation d’un autre jeune à l’angle de la Cours de Vincennes et de la rue du Général Niessel (près des rails de tramway) provoque des huées. La CSI (compagnie de sécurisation et d’intervention) exfiltre l’individu à l’entrée de la cour d’immeuble du 2 rue Général Niessel. Ils sont au moins cinq policiers autour de l’adolescent assis dans la cour de l’immeuble, passif et menotté. Une autre unité arrive alors en renforts. Là aussi, elle se déplace sous les sifflets. Ils sont cinq hommes et avancent en file indienne le long du muret de la résidence. Soudain, l’homme de tête balance une grenade de désencerclement en plein milieu de la foule.

Il n’y avait pourtant là aucun danger caractéristique. Et quand bien même il y en aurait eu, le groupe aurait pu se replier en une poignée de secondes dans la cour d’immeuble (déjà protégée par d’autres policiers présents !). Rien ne justifiait l’usage d’une grenade de désencerclement selon "leurs règles". Aucun point de contrôle sensible n’était à protéger et la foule n’était pas menaçante. A moins que les huées soient perçues comme des menaces suffisamment sérieuses...

Une fois l’explosion de la grenade, un homme s’effondre au sol. Directement sur le bitume et non sur un « poteau de protection » comme tente honteusement de nous le faire croire une « source proche de l’enquête ». Les images choquantes l’attestent sans difficulté [1]

Très vite, les gens pratiquent les premiers secours sur l’individu touché à la tempe gauche dont l’hémorragie est criante. Des gens aident le blessé mais ça n’a pas l’air de plaire à la Police. Alors que fait-elle ? Et bèh elle rebalance une grenade sur la foule mais cette fois-ci elle est lacrymogène. Heureusement que le blessé allongé au sol n’a pas besoin d’un peu d’oxygène...

Une fois transporté par les pompiers (et non le SAMU !), on apprend par voie de presse que la situation est suffisamment grave pour que des communiqués officiels sur cet épisode spécifique du jeudi 26 mai soient publiés.

Hospitalisé à la Pitié-Salpêtrière, le jeune souffre d’un enfoncement de la boîte crânienne et d’un œdème cérébral. Aux dernières nouvelles (samedi 28 dans l’après-midi, soit deux jours après les faits), la vie du jeune homme n’est plus en jeu mais il est plongé dans le coma (ou « sédation profonde »). À son réveil, les séquelles sont potentiellement graves.

Le ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve a indiqué que « s’il y a eu un manquement à la déontologie […] comme toujours, il en tirera les conséquences ». Vous y croyez vous ?

Alors dans ce cas là monsieur Cazeneuve, désarmez la Police qui nous mutile, qui nous éborgne et qui provoque des blessures irrémédiables (LBD40, Flashball, grenade de désencerclement...).

On se chargera de supprimer par nous-même le Travail et la Police.

Notons également que depuis plusieurs semaines, les forces de l’ordre subtilisent aux abords des manifestations de simples objets à caractère défensif. Lunettes de piscine, sérum physiologique, casques de protection et même bouchons anti-bruit ! Tout y passe. Mais que peut bien craindre le gouvernement d’un produit pour nourrisson ? À ces confiscations de matériel, les policiers baragouinent avec un sourire narquois « ce sont les ordres ! »

Est-ce que l’ordre c’est aussi faire des « tentatives d’homicides » avec des grenades policières ? On a connu le Pouvoir plus réactif !

Au passage, ce lundi 30 mai, le secrétaire général de la CGT Info’Com est convoqué dans des locaux de la Préfecture de Police pour s’expliquer sur les affiches « honteuses » dénonçant les violences policières. Ne riez pas...

Après ces manifestations du 26 mai, une chose est certaine : tout le monde déteste encore plus la Police !

Note

Quelques liens à piocher :

Une « autopsie » détaillée de la grenade de désencerclement, celle qui a donc grièvement blessé le jeune homme, est à lire par ici. Glaçant...

La parution d’un livre sur les violences d’État écrit par Pierre Douillard, éborgné par un tir de LBD40 en 2007.

Une analyse des séquelles psychologiques des blessures de la police.

Notes

[1La scène est visible à partir de la 6e minute.

Localisation : Paris

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