Entretien avec Lorenzo Kom’Boa Ervin militant et auteur de « Anarchism and Black Revolution »

Lorenzo Kom’Boa Ervin, un ancien membre du Black Panther Party, revient, dans cette interview des années 1990 republiée par Alternative Libertaire Bruxelles, sur son parcours, ses luttes, les faiblesses de l’anarchie américaine et contemporaine, les luttes ouvrières, etc.

Très courte bio de Lorenzo Kom’Boa Ervin

Lorenzo Kom’boa Ervin est un ancien membre du Black Panther Party (BPP). Dès 12 ans, il milite au sein de la NAACP (National Association for the Advancement of Colored People), puis devient activiste contre la guerre au Vietnam avant de rejoindre le BPP à la fin des années 1960. En 1969, il fait partie des Panthers qui détournent un avion pour Cuba afin de fuir une condamnation aux États-Unis, accusé du meurtre d’un dirigeant du Ku Klux Klan. Après un exil à Cuba et en Tchécoslovaquie, il est rattrapé par les autorités étatsuniennes et passera près de 15 ans en prison. Militant de l’autonomie noire, il a notamment écrit Anarchism and the Black Revolution.
Tiré de la plateforme BboyKonsian.

Qu’est-ce qui t’a radicalisé et mené vers une vie de militantisme politique ? Qu’est-ce qui t’a mené vers l’anarchisme ?

J’ai été élevé dans le « Vieux Sud » avant l’avènement du mouvement pour les droits civiques des années 50 et 60. Bien que les protestations aient débuté et continué dans des villes du Sud dès 1954, ce n’est qu’avec le boycott des bus à Montgomery (Alabama) qu’elles sont de fait devenues plus qu’un phénomène local, et ont pris une importance nationale. Le boycott des bus est devenu un évènement de renommée mondiale, et ont fait du Dr. Martin Luther King Jr. un personnage d’envergure internationale. Issu de la base, ce boycott m’a influencé ainsi que des millions d’autres Africaines en Amérique car il reflétait le désir des masses noires de détruire les institutions étatiques blanches racistes qui existaient à l’époque dans le Sud.

La majeure partie de l’histoire du boycott des bus à Montgomery est assez connue, mais comme vous pouvez l’imaginer, la lutte pour les droits civiques n’était pas que l’œuvre du Dr. King. Même si on a créé un mythe national disant qu’il a suffi que Dr. King fasse quelques interventions devant les masses noires opprimées à Montgomery pour qu’un mouvement naisse et que son cri soit entendu par John Kennedy, le "grand maître blanc" à Washington D.C., qui fît passer une législation de protection des droits civiques.
Cette version simpliste est de la propagande gouvernementale destinée à cacher l’hostilité et l’inaction du gouvernement fédéral, ainsi que le pouvoir du mouvement qui a obtenu des concessions du gouvernement et de ses appuis économiques. Par exemple, pour quelle raison E.D.Nixon, leader local de la National Association for the Advancement of Colored people (NAACP) et organisateur de base à Montgomery durant de nombreuses années, a-t-il été oublié de l’histoire ?
La réponse à cette question est très importante parce qu’elle montre comment des personnages et des mouvements sociaux ont été oubliés de l’histoire, et comment la révision de la mémoire historique est utilisée comme une arme idéologique pour handicaper les générations suivantes.

Mais ma radicalisation a réellement commencé avec le mouvement sit-in d’étudiants et de jeunes, qui a débuté à Greensboro, en Caroline du Nord, durant l’année 1960 lorsque quatre étudiantes noires du Collège North Carolina A & T sont rentrées dans un grand magasin Woolworth, se sont assises au comptoir et ont demandé à être servies. Avant que cela se termine, 5000 étudiantes, jeunes et personnes issues de la communauté noire ont participé à cette protestation, qui s’est étendue sur tout l’État de la Caroline du Nord dans les jours suivants. Finalement, la force et la furie pure de ces protestations ont forcé les élus municipaux blancs de Greensboro à faire des concessions et au moins temporairement à démanteler les lois ségrégationnistes.

Cette victoire a inspiré l’irruption de luttes similaires dans tout le Sud : Louisville (KY), Richmond (VA), Baltimore (MD), Nashville (TN) et d’autres villes. En fait, des historiennes ont estimé que dans les quinze jours qui ont suivi les événements de Greensboro, 69 autres villes ont été touchées par des protestations similaires.(…)

Lire tout l’entretien sur le site d’Alternative Libertaire Bruxelles

Mots-clefs : anarchisme

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