Double interdiction de paraître à Paris : quand l’État montre ses faiblesses

Hier soir vers 22 heures, deux équipages de la BAC de Nuit du Val de Marne (les mêmes qui ont mené la chasse à l’homme du 28 avril au soir sur la Place de la République) ont débarqué à mon domicile pour me délivrer une interdiction de paraître...

Sans prendre la peine de sonner, ils ont forcé la porte du rez-de-chaussée avant de monter dans la cage d’escalier. Au premier étage, l’un d’eux a d’abord passé sa tête par la porte en lançant « coucou ! ». Deux amis qui s’y trouvaient l’ont cordialement salué avant de se rendre compte qu’il n’était pas seul et qu’il s’agissait de flics.

L’écusson des flics de la BAC de Nuit

Étant à ma recherche, les chiroptères sont très vite arrivés à mon étage. Avant qu’ils ne fouinent ailleurs dans l’immeuble, on est sortis dans la cage d’escalier. Leur commissaire m’a demandé ma pièce d’identité, puis l’OPJ a précisé qu’ils étaient venus me remettre un document.

J’avais déjà compris. Les flics distribuent des arrêtés comme ils distribuent des coups de matraques.

J’ai aussi compris comment le préfet Cadot et la « grande famille du ministère de l’intérieur » (dixit Bernard Vieille-Caze) procède pour sélectionner celles et ceux qui seront « interdit-e-s de paraître ». Ils se contentent de prendre, avec la complicité du Procureur de la République et en dépit de toute présomption d’innocence, la liste de toutes celles et ceux qui ont été interpellé-e-s dans le cadre du mouvement contre la loi travail (bel exemple de séparation des pouvoirs). Et cela en dépit du fait que les personnes concernées aient seulement fait l’objet d’un contrôle d’identité, qu’elles aient été relaxées ou que leur jugement n’ait pas encore eu lieu.

Seulement voila, en procédant de la sorte, en piochant au pif dans leurs stupides listings, ils n’ont pas tenu compte du fait que, dans le cadre de ma mise en examen et du contrôle judiciaire qui l’accompagne, je suis déjà interdit de me rendre à Paris. Par cette bourde ridicule, ils confirment le caractère totalement arbitraire de leurs arrêtés et le fait qu’ils se foutent bien de cibler des personnes ayant réellement participé à des « violences ».

De la même manière, quand Cazeneuve annonce l’arrestation de plusieurs centaines de « casseurs », il ment ostentatoirement et pisse sur la tête des juges en déclarant coupables des centaines de personnes qui n’ont même pas été jugées. Vous me direz, tant mieux si les puissants se méprisent entre eux…

Je ne me suis pas privé de dire aux ptérodactyles venus montrer leurs pectoraux dans notre immeuble qu’ils ne servaient à rien et que cette double interdiction en était une preuve on ne peut plus éloquente.

Les cinq volatiles ont bien tenté de se la ramener, mais on ne leur a pas tellement donné le loisir de parler. Jusqu’à ce qu’il se décident à descendre l’escalier, on n’a pas cessé de les incendier (au sens figuré) en leur rappelant leur rôle social, en leur disant qu’on se passait de leur protection, qu’on connaissait bien la nature de leurs actes de bravoure et qu’ils n’étaient pas chez eux. Je crois qu’on a parlé de camps de concentration, des stades au Chili sous Pinochet, des 15 personnes tuées chaque année par leurs collègues, de la manière dont leurs collègues se sont tirés mutuellement dessus autour de l’immeuble de Abaaoud à Saint Denis et de leur très glorieuse intervention auprès des Compagnies de Sécurisation et d’Intervention le 28 avril à République, où comment c’était républicain de mettre des coups de poing dans le ventre de personnes menottées…

La BAC 94 en action dans la nuit du 28 au 29 avril à République
(voir les vidéo ici à 1min20 et )

Après qu’ils aient tenté de rester dans l’escalier en proférant des menaces, l’un d’eux a réagit en lançant qu’ « un nez cassé, ça arrive vite » puis, en sortant, a ajouté « vous n’oublierez pas de sortir les poubelles ».

Pauvres types !

Mots-clefs : répression
Localisation : Ivry-sur-Seine

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