Contre la suppression des cours de musique individuels, contre les licenciements déguisés

Pour la première fois , les salarié-e-s des centres d’animation se coordonnent pour le maintien des activites au service de la population parisienne.

Dans son communiqué daté du 27 janvier 2015, la Ville de Paris se félicite de « mettre en œuvre la modernisation de ses équipements municipaux dédiés à la jeunesse ». Elle annonce également que : « Le modèle économique de ces équipements évoluera, avec un assouplissement de leur cahier des charges pour adapter davantage l’offre aux besoins »

Qui va payer pour cette souplesse ?

Ces belles paroles masquent mal les restrictions budgétaires et coupes sombres qui vont s’opérer au sein des personnels travaillant dans ces différents espaces. En effet, c’est désormais les financiers qui décident à la Ville de Paris et non plus le projet politique ou les élus. Ainsi, il n’y a eu aucune question sur la pédagogie lors des rencontres avec les candidats pour la gestion dans le cadre des marchés des lieux de la jeunesse.

C’est bien d’un plan social à l’échelle de la ville qu’il s’agit.

Avec la suppression pure et simple des ateliers individuels de musique et en plus de l’éviction attendue d’une partie des personnels, on assiste à une véritable privatisation de ce type de services car les conservatoires ne peuvent assurer à eux seuls la demande. Cette mesure revient également à nier la spécificité des centres d’animation, qui offrent une véritable alternative à la pédagogie de conservatoire.

Avec la baisse du nombre d’activités (qui passent de 9 à 7 obligatoire), les salariés verront leur nombre d’heures diminué et une partie des contrats avec les prestataires prendront tout simplement fin. Notons au passage que certains gestionnaires ont largement anticipé cette décision de la ville en cessant d’embaucher en cdi, comme c’était l’usage, pour faire appel à des prestataire de service, auto-entrepreneurs ou salariés d’une autre association, miracle de la sous-traitance.

La ville souhaite augmenter le nombre de participants aux activités qui demeureront en place mais c’est oublier que certains ateliers ne peuvent se dérouler qu’avec un petit nombre d’usagers si l’on ne veut pas mettre à mal la qualité de l’enseignement dispensé. C’est obliger à envisager des groupes de niveau dans des lieux dédiés à l’éducation populaire. Parfois l’obstacle est simplement matériel, la taille des salles ne permettant d’accueillir que des effectifs limités.

La ville se désinvestit de la gestion d’une partie de ces équipements en ne proposant plus des délégations de service public (DSP) ou des marchés, mais des appels d’offres, comme aux Amandiers, où il est bien précisé que « L’occupant exploitera l’équipement dans son propre intérêt et ne répondra pas à une demande de la Ville de Paris ». A la question posée par des postulants à la gestion du lieu sur la reprise du personnel, la ville répond que la question « ne peut être tranchée car elle est intrinsèquement liée à la nature du projet qui sera retenu ». La ville réalise avec brio le rêve de tout employeur : planifier des licenciements sans se salir les mains puisque les suppressions de postes ne pourront venir que de la proposition du futur gestionnaire et qu’il appartiendra à l’ancien de reclasser ou licencier les personnes actuellement en place.

La ville compte aujourd’hui 11 Antennes Jeunes, 7 Espaces Jeunes, 3 Lieux d’Accueil Innovants. Il est prévu de passer le nombre de ces équipements de 21 à 13. Que deviennent les personnels en place dans ces lieux ? Il y a risque de licenciement de plus de 50 personnes !

il s’agit de contourner le code du travail où les salariés sont repris en changeant la fonction de l’équipement (cela concerne le centre des Amandiers comme le réseau des points information jeunesse (pij) / antenne jeunes donc des profils de postes).

Une partie d’entre eux (13 personnes) devraient être affectés dans les centres d’animation, désormais chargés d’accueillir les points information jeunesse. Or aucun espace dans les centres n’est prévu pour ce type d’action, il faut donc libérer de la place, ce qui se fera au dépend des ateliers ou des autres activités déjà en place, comme l’annonce la mesure de réduction du nombre d’ateliers. Avec l’accueil des jeunes de façon informel, ce sont les risques psycho sociaux et les stress liés aux conditions de travail qui vont augmenter et qui sont déjà réels dans les centres d’animations sans représentations d’organisations syndicales.

Comment concilier l’accueil de publics aux rythmes aussi différents que les 3-12 ans, déjà largement présents sur les centres et celui des 13-25 ans sans que la ville en donne les moyens réels, en effectifs, en heures de travail et en infrastructures ? Rappelons que la ville a diminué le nombre de postes d’éducateurs de rue lors des reconventionnement soit au moins un poste à chaque fois pour l’ultra majorité des clubs de prévention. Dans de nombreux centres, l’accueil informel des jeunes a souvent tourné cours et s’est soldé par le recours à des vigiles, faute de moyens, de personnel qualifié ou pour d’autres raisons encore.

Avec la réforme des rythmes scolaires, le transfert de certaines activités vers le périscolaire, l’ouverture d’activités le samedi matin en concurrence des centres d’animations ne visent elles pas à transférer vers le périscolaire et la Direction des affaires scolaires de la Ville de Paris (DASCO) et les lieux que sont les écoles, les 3/12 ans pour libérer des espaces pour les jeunes dans les centres ? Aucune réponse dans les textes de l’Hôtel de Ville.

L’extension du nombre d’heures d’ouverture des centres non assorti d’une augmentation du personnel risque de se traduire par une dégradation des conditions de travail pour des salariés et prestataires déjà mis à mal, aux horaires atypiques et aux multiples casquettes souvent en effectif réduit (parfois une seule personne pour l’accueil, l’ouverture et la fermeture d’un lieu comportant plusieurs étages, y compris à des horaires tardifs) et dont les rémunérations correspondent rarement aux tâches réellement effectuées.

Comment croire que la ville souhaite démocratiser l’accès aux centres d’animation quand elle a supprimé la tranche spécifique aux publics étudiants désormais obligés de demander la feuille d’impôts de leurs parents pour pouvoir accéder aux activités ? Comment ne pas voir une privatisation masquée dans l’ajout d’une tranche supplémentaire aux grilles tarifaires, qui a fait partir les publics les plus aisés vers le privé, remettant en question la mixité sociale dans les centres d’animation et rendant certains ateliers moins rentables, ce qui permet aujourd’hui de défendre en toute quiétude le bien fondé de leur fermeture, alors même qu’il s’agit d’un service public financé par la collectivité ?

Enfin, on remarque que les seules personnes qui n’ont pas été consultées sont celles censées mettre en œuvre cette réforme ou en subir les conséquences directes sous forme de dégradation de leurs conditions de travail ou de licenciements complets ou partiels : les travailleurs de ces équipements dont seule la hiérarchie a été conviée aux discussions les concernant et qui n’ont souvent pas jugé bon de recueillir leur avis.

Les arguments avancés par la ville pour défendre cette réforme ne sont qu’un écran de fumée qui dissimule mal des mesures purement financières dont le coût social à long terme pourrait s’avérer largement supérieur aux économies espérées et qui, si elle est appliquée, ne fera qu’accroître les inégalités au sein des populations et mettra à mal le vivre ensemble de manière durable.

Nous attendons de la ville :

• Qu’elle mette fin à cette politique de restriction budgétaire dont les effets à long terme ne peuvent être que dramatiques.
• Qu’elle prenne ses responsabilités vis à vis des personnels en place en maintenant leurs postes ou en leur proposant elle-même des requalifications.
• Qu’elle se donne réellement les moyens d’une politique d’éducation populaire en prenant en compte les conditions de travail des personnels, en prévoyant des heures de préparation dans les temps de travail afin d’avoir une action efficace dans les moments d’accueil des publics et des effectifs suffisants adaptés aux lieux.

Les adhérent-e-s CNT solidarité Ouvrière des centres d’animation de Paris

Les salarié-e-s appellent le mardi 16 février à un rassemblement de 9 h à 11h place du Châtelet à Paris.

Mots-clefs : travail social
Localisation : Paris 1er

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