« Burning Country » Les syriens dans la guerre et la révolution...

Interview avec Robin Yassin-Kassab, co-auteur avec Leila Al-Shami du livre « Burning Country » sur le processus révolutionnaire en Syrie depuis 2011, la situation actuelle, et l’impasse et l’aveuglement d’une partie de la gauche occidentale.

La guerre en Syrie est en passe de devenir le mouroir d’une génération révolutionnaire qui s’est levée depuis 2011 au moins. Une seule vague révolutionnaire a fait des bons d’un côté à l’autre de la méditerranée. Une seule vague de contre-révolution s’abat désormais sur elle. « Ne bougez plus sinon viendront les rivières de sang... » semblent nous dire à l’unisson et en autant de langues différentes, toutes les puissances étatiques investies sur le « terrain » syrien.

Ce sont aujourd’hui près de 12 puissances étrangères qui bombardent ce pays en état de guerre civile multi-partite. La superposition des enjeux particuliers de telle ou telle puissance ou de ses alliés, de tel ou tel groupe tour à tour favorisé par untel ou untel, semble avoir enlevé toute lisibilité à la révolution syrienne. Le mouvement populaire d’émancipation qui avait pris les rues en 2011, dans le sillage des révoltes arabes contre les autocraties, pour renverser le régime Assad, semble avoir disparu sous les intrigues diplomatiques qui font la une de l’actualité. Les lectures conspirationnistes et confusionnistes qui font florès de l’extrême-gauche à l’extrême droite continuent de maintenir les révolutionnaires syriens dans un isolement sidérant, et c’est une catastrophe sans équivalent récent qui joue là ses derniers actes dans le plus grand silence.

Depuis mercredi dernier les quartiers-est d’Alep, symboles de l’insurrection, libérés de l’emprise du régime depuis plus de quatre ans et auto-organisés par les différentes tendances de la rébellion, sont retombés dans les mains du régime. Pour en arriver là il aura fallu toutes les apparentes tergiversations des puissances membres du conseil de sécurité de l’ONU et leur ralliement de facto au scenario de l’abandon d’Alep à Assad et ses alliés russes et iraniens... ainsi qu’un déluge de feu et d’attaques chimiques d’une envergure inégalée.
Il est peut-être déjà trop tard pour « sauver » la révolution syrienne, mais ce qui a commencé en 2011 en tant d’endroits du pourtour méditerranéen a semé des graines qui mettront des années à mûrir sous la glace. Il nous faut, à nous au moins autant qu’aux syriens, comprendre ce qu’il s’est passé et en tirer les leçons qui s’imposent.
L’entretien qui suit est une première pierre à cet indispensable travail d’explicitation.

Mots-clefs : guerre | Syrie | Rojava

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